A peine une année s’est écoulée et nos amis d’Asia sont de retour pour un deuxième album. Pas de modification dans le personnel, tout le monde est à bord. Les musiciens, le producteur (Mike Stone), et l’artiste peintre Roger Dean. C’est vraiment ‘On prend les mêmes et on recommence’ ou encore ’On ne change pas une équipe qui gagne’.
Quelques petits détails, a posteriori, attire l’œil du chroniqueur qui a vécu cette période en direct et qui se retourne l’espace d’un instant sur un passé vieux de 25 ans. Le premier, c’est que, sur les 10 chansons qui constituent Alpha, 9 sont signées du duo Wetton/Downes, la dernière du seul Wetton. Autre détail, avec la somme d’obligations qu’a eu le groupe à l’époque, un nouvel album sort un an après le premier. C’est court. Mais revenons à la musique, peut-être que ces détails sont sans importance, après tout ?
Alpha, c’est son nom, commence par un A, finit par un A (comme Asia). Cette petite particularité durera quelques albums (avec une entorse pour Then and Now) pour s’achever avec Silent Nations.
Mais "Alpha" commence aussi par un tube : Don’t Cry. Il semblerait qu’Asia reparte sur des bases similaires au premier album qui s’ouvrait avec Heat Of The Moment. Une intro à s’envoler, un rythme enlevé, une mélodie comme John Wetton sait nous en concocter et voilà un tube de 3 minutes et demie. Mais le fossé avec ce que ces musiciens de haut vol nous ont présenté par le passé ne se creuse-t-il pas déjà ? Pas même un petit solo de guitare ou de clavier ? Il y a anguille sous roche. Surtout que The Smile Has Left Your Eyes fait encore plus court avec ses 3 minutes. Non pas que ce soit de la mauvaise musique, mais il semble qu’Asia a déjà franchit le pas et fait de la Pop Musique (Il s’agit ici du titre composé par John Wetton seul).
Never In A Million Years est pâle, avec une jolie mélodie, bien arrangé par Howe et Downes, mais rien ne ressort de toute ça. My Own Time est de la même veine. Vient alors le sentiment frustrant que le talent immense de tous ces musiciens est utilisé pour arranger des chansons de seconde zone. L’hégémonie du duo Wetton/Downes explique à coup sûr cela. Le temps imparti (très court) à la création de ce disque aussi…
The Heat Goes On relève le niveau. Il est de la trempe du premier Asia. Un solo d’orgue (c’est le premier solo de Geoff Downes du CD, et il n’a pas mis ses gants de boxe, le garçon) illustre ce renouveau. Ouf !
Eye To Eye, le plus court des 10 titres proposés, se démarque par une légère dissonance bienvenue et surtout inhabituelle chez Asia, mais qui encore une fois vaut surtout pour son orchestration impeccable (Steve Howe enjolive comme il peut). The Last To Know offre un plus, une petite digression musicale dans une plaine de guimauve. Ce morceau colle aux doigts.
True Colors, à ne pas confondre avec l’immense succès de Cindy Lauper, bénéficie encore et toujours des idées de ces artistes ainsi que de leur maîtrise parfaite de l’harmonie. Quand, comme eux, on a travaillé sur du Yes ou du King Crimson, on sait arranger un morceau aux petits oignons. Midnight Sun sera le dernier titre un peu ennuyeux d’une série, tous comptes faits, extrêmement longue.
Le dernier, car celui qui suit, et qui termine l’album, Open Your Eyes, a un final qui justifie à lui seul les 9 autres titres à attendre. Les patients sont récompensés. C’est comme si Asia s’était dit : ‘Nous ne pouvons pas les laisser comme ça, sans un truc bien’. La mélodie d’intro laisse entendre qu’il va se passer quelque chose. Et même si la partie principale du morceau n’est pas inoubliable, le finale va réconcilier tout le monde avec Asia jusqu’au prochain album. Une envolée sur un lit de chœurs, une rythmique bien assise, prête à tout supporter, et des claviers qui nous offrent une montée que va terminer en beauté Steve Howe. Ce solo du guitariste anglais se devait d’être à la hauteur, car c’était son dernier avant 25 ans, eh oui. La première mouture d’Asia a vécu… L’entente entre toutes ces stars ne devait pas être optimale, et la tournure pop du groupe n’a pas du plaire à ce guitariste habitué à un travail plus élaboré.
L’avenir nous dira si Asia n’a été qu’un feu de paille auprès duquel nous n’aurons pas eu le temps de nous réchauffer ou si les braises de talent avaient simplement manqué un peu d’air pour se ranimer en si peu de temps. A suivre…