« Angel Dust » est sans aucun doute l’album de Faith no More qui aura le plus impressionné. Alors que seulement trois ans séparent celui-ci de son prédécesseur direct « The Real Thing », la comparaison semble tout bonnement impossible. Faith no More est en effet passé d’une sorte de fusion métal bigarrée et insouciante à un Metal/Rock sombre et expérimental.
Le terme expérimental n’est pas ici synonyme de dissonance ni d’exploit technique. En effet, la musique de cette formation reste toujours abordable mélodiquement et les structures restent dans leur globalité assez simples. Ce qualificatif viendrait plutôt des tournures que prennent la majorité des titres.
Alors que certains groupes se contentent du trop classique format refrain/couplet, Faith no More propose des cassures tel sur « smaller & smaller » et son chant indien, d’innombrables effets de style, allant de la batterie très appuyée sur « Everything’s Ruined » à un mélange détonnant de riffs wah-wah et d’orgue Hammond sur « Be Aggressive » (cette dernière sera d’ailleurs méchamment plagiée par un certain Marilyn Manson) en passant par les nombreuses digressions dans le métal fusion (Riffs + paroles rappées) si chères au groupe depuis ses débuts.
Quant au terme sombre, très approprié sur la majeure partie de l’album, il atteint son apogée sur des titres comme Crack Hitler ou le dérangeant Jizzlobber dans lequel, hurlements, accords malsains et riffs ultra lourds se mélangent pour donner une terrible sensation d’aigreur. Les dernières mesures de ce titre avec orgue et chœurs d’église dans un style très mortuaire peut même donner la chair de poule.
Mais il faut le reconnaitre, Faith no More n’aurait certainement pas atteint une telle renommée sans sa voix. Véritable caméléon du chant, Mike Patton présente une facilité à varier ses interventions, à tel point que l’on en vient parfois à se demander si le chanteur est bien le même sur tous les titres. Tour à tour déformée, hurlée, claire et mélodieuse, rageuse, douce, la voix de Patton se calque à l’ambiance de la composition pour la faire vivre. L’aspect nasillard qui caractérisait son chant dans « Real Thing » a tout bonnement disparu.
Guitares acérées ou libérées, claviers omniprésents en arrière plan, variations, originalité, interprétation ahurissante de justesse, tous les éléments se sont combinés sur ce « Angel Dust » pour construire un album à l’écoute parfois éprouvante mais un album hors du commun et surtout, pour l’époque, hors du temps.