Lorsqu’ils entrèrent en studio pour donner naissance au successeur de l’extraordinaire double Live Strangers In The Night, Mogg et sa bande, en 1979, ont dû se poser la sempiternelle question qui taraude tous les artistes : « comment faire mieux que l’album précédent » ?... Or, la conjoncture à laquelle était confronté le groupe cette année-là était encore plus délicate que celles qu’ils avaient l’habitude de traverser, et ce pour deux raisons. La première provenait de la particularité du disque précédent, un Live d’anthologie. La seconde touchait à la structure même du combo, le Schenk s’étant fait la malle depuis le début de l’année. A première vue le handicap, était insurmontable tant Strangers In The Night était proche de la perfection et tant le blond guitariste imprégnait de sa touche magique les œuvres passées de l’OVNI anglais.
Alors, que faire pour calmer les crises d’angoisse existentielle ? Faire appel à un producteur de légende en la personne de Georges Martin (l’attitré des Beatles) ? Recruter une pointure du manche pour remplacer le teuton à la Flying V ? Les deux ne seraient très certainement pas de trop.
No Place To Run sortira l’année suivante et décevra, forcément, malgré la présence du surnommé "le cinquième Beatles" (excusez du peu !) et les efforts louables, voire méritants, du père Chapman convié à faire oublier la bête de la six-cordes. Cet opus plombe quelque peu la dynamique du décollage de la soucoupe volante britannique qui reprendra son envol avec le très bon The Wild, The Willing And The Innocent l’année suivante.
Mais ne vous méprenez pas, No Place To Run est malgré cela un bon album. Il s'agit tout de même d’UFO ; UFO, ce groupe de gamins qui pond en 1970 un premier album éponyme teinté largement de Space Metal, option que nous retrouverons avec l’entrée en matière instrumentale et sombre de l’album, le dénommé Alpha Centauri ; UFO, ce groupe de jeunes gens qui sort en 1974 Phenomenom, un 3ème album studio de Rock à la fois planant et rugueux, caractéristiques musicales retrouvées avec les tendres Gone In The Night et Take It Or Leave It pour la première et Mystery Train, Young Blood et Money Money pour la seconde ; UFO, ce groupe de jeunes hommes qui enfante en 1978 son septième album, le rutilant Obsession, guidé par un esprit Melodic Rock, style que l’on retrouve dans quelques titres de No Place To Run comme This Fire Burns Tonight et le titre éponyme de l’album.
Ainsi, No Place To Run plonge ses racines dans le passé du groupe. Toutefois, on peut reconnaître dans certaines sonorités, les graines qui produiront le bouquet musical d’UFO à l’avenir, durant sa pèriode dorée : rythmique majestueuse, soli chatoyants et mélodies entêtantes. Ecoutez Lettin’ Go et Anyday par exemple qui n’auraient pas dépareillé dans The Wild, The Willing And The Innocent.
Cet album de qualité, qui fût peut être celui qui passa le plus inaperçu dans la prolifique carrière du groupe, mérite que vous y jetiez une oreille. Il représente en fait l’antichambre de la période de succès qui récompensera les anglais les années suivantes. Rien que pour ça, les connaisseurs apprécieront.