Un roulement de caisse claire robotique, synthétique et tout est parti. Le martèlement rythmique du Culte Godflesh se met en marche et la musique sombre en quelques secondes dans un monde oppressant. Un monde dans lequel les sons sont mis en boucles, où l'humain simple cobaye destiné à subir la répétition de l'agression n'a plus réellement sa place. Il est broyé puis mis en boite par cette conception rythmique de la musicalité, assommé par les effets destructeurs du duel incessant qui oppose les éléments tellement mécaniques de l'œuvre.
Les éléments... des instruments dénaturés ayant perdu leur superbe, en quête d'un sens nouveau. La basse saturée ne se fond plus dans la construction rythmique mais percute violemment les beats industriels dans un duel assourdissant, stressant, plus stressant encore quand la guitare vient cracher des riffs distordus et dissonants sur lesquels viennent se greffer les voix désincarnées passant douloureusement du hurlement désespéré a la complainte presque mélodique dont toute forme de vie semble absente. Les tempos ne sont pas rapides, ne sont pas lents et n'obéissent pas aux règles d'une théorie musicale visiblement dépassée par l'évènement.
Dépassé aussi le système d'accordage revisité pour permettre au spectre sonore d'infiltrer les bas fonds de l'infra musicalité, là où Godflesh puise l'anesthésiant qui laisse notre conscience au seuil de cet Univers hors de tout dans lequel même les larsens sont sous contrôle. "Godflesh" l'oeuvre, cette machine dotée d'une âme qui absorbe les vapeurs nocives que laisse échapper notre urbanisation, les transforme et les recrache brutalement sur 8 morceaux qui marquent le début d'une ère nouvelle.
Août 1988, la chose est enregistrée. Mai 2008, le temps ne l'a pas usé. Le son manque de dynamique... Peu importe, hors sujet même, l'ensemble n'a pas faibli et une puissance hypnotique hallucinante anime toujours cette œuvre éponyme de métal industriel définitivement inoxydable.