Ce qu’il y a de bien avec les formations québécoises, c’est que généralement elles ne s’embêtent pas à utiliser un anglais approximatif pour faire du rock, la plupart du temps elles chantent en français. Cette alliance de la langue française et du rock anglo-saxon a permis à certains groupes comme Harmonium ou Pollen d’offrir dans les années 70 quelques pépites au rock progressif, mais il faut bien dire que dernièrement c’est surtout dans la langue de Shakespeare que s’exprimaient les formations canadiennes (Mystery, Sense, Hamadryad…)
Jelly Fiche, nouveau groupe de rock progressif, a décidé lui de s’exprimer dans la langue de Molière pour faire passer ses textes et il faut avouer que pour un premier album le résultat est admirable. Tout en s’inspirant clairement des grandes formations de rock progressif des années 70 (si « Les arbres » ne vous font pas penser à Pink Floyd, il faut absolument que vous réécoutiez Pink Floyd), en utilisant une poésie à la fois imagée et mystérieuse et quelques artifices plus modernes comme l’échantillonnage, le groupe a su créer une alchimie particulière et accrocheuse comme sur la magnifique « Source infinie » avec son refrain que l’on pourrait réécouter en boucle.
Les compositions sont plutôt longues et suffisamment variées pour vous faire voyager sans heurts mais avec émerveillement tout du long du parcours musical qui vous est proposé. La guitare acoustique et les claviers analogiques prédominent, le chant est lyrique quand cela est nécessaire, parfois rageur, souvent très doux et posé, il rappelle parfois celui du premier (et regretté) chanteur d’Hamadryad. Le saxophone apporte enfin une petite touche jazzy quand il est employé.
Saluons au passage le label Unicorn Record qui est entrain de se créer une sacrée écurie de groupes progressif tous plus intéressants les uns que les autres (Mystery, Gourishankar, Nil…)
Avec « Tout ce que j’ai rêvé », Jelly Fiche vient de sortir un des meilleurs albums progressif de l’année, qui plus est en langue française. Un album mélodique, touchant, rêveur et protéiforme, la définition de ce que devrait toujours être le rock progressif.