Root est un groupe polonais sévissant à Varsovie qui présente avec "Personality Disorder" sa première production artistique. En ce qui concerne les éléments d’usages à propos de cette formation, ce ne fut pas sans mal pour trouver les quelques renseignements indispensables (merci quand même aux collègues et à myspace). Bien qu’il existe tout de même des "Root" dans la grande fratrie musicale (notamment aux Etats-Unis), celui qui nous intéresse tout particulièrement laisse à penser qu’il n’y a très longtemps que ces musiciens se sont réunis pour former leur "Root" bien à eux.
Ce premier album, distribué par le label Rossmann, adhère à un courant alliant un rock nappé de pointes psychédéliques et dont les réminiscences grunge/stoner, qui au passage n’ont pas fait couler que beaucoup d’encre, demeurent bien enracinées sur les compositions de "Personality Disorder".
Tout débute sous la coupe d’une introduction psychédélico-planante balancée sous le sobriquet déjanté de "Miscellaneousmischief ". Passé cet instrumental, qui n’emballe pas franchement, l’ambiance se dessine autour de symptômes musicaux lourds et oppressants. "Water" ne faillit pas à cette tendance et permet enfin d’entendre le brin de voix du chanteur, qui s’adapte fort bien à ce contexte. Les guitares sont rondes mais assez agressives, avec un toucher dissonant sur les harmonies du solo final. Le rythme imposé par la batterie, pesant et puissant, impute à ce titre un groove bien particulier. Ce schéma de construction restera le canevas de base de la majorité des plages de "Personality Disorder".
Cependant, n’allez pas imaginer que tout se ressemble à s’y méprendre et que l’objectif principal de Root est de plonger l’auditeur dans un ennui profond. Pour preuve, "Modern Needs" et "Sandpaper" reflètent la personnalité de cette jeune formation et démontrent de manière directe et sans fioriture que l’impact spirituel de grands noms de la rock music rebelle et indisciplinée (pléonasme ?), comme Patti Smith, Lou Reed ou Kurt Cobain, n’est pas encore complètement obsolète. D’ailleurs, "Leave" s’inspire très ouvertement de la fibre créatrice d’une formation aussi mythique que Nirvana. De même que "Uncontrolled" devrait attirer l’oreille avisée du père Windorf (Monster Magnet). Quant à l’étagère du rayon nerveux et boosté, elle dispose d’un assortiment de choix avec "Breathing Ammunition" aux forts embruns Red Hot Chili Peppers et "Rewind" beaucoup plus axé sur un registre punkisant.
Finalement, après une écoute attentive, "Personality Disorder" fait apparaître de réelles et solides aptitudes de la part de ce jeune combo. Bien qu’il y ait encore quelques efforts à fournir pour se détacher davantage des maîtres du genre, Root apporte honorablement sa contribution à un mouvement qui ne semble pas en perte de vitesse. Toutefois, le contenu de cette galette aurait pu être exposé bien plus brillamment avec une production moins linéaire et plus aérée.
Mais fort heureusement, l’esprit "underground" dans lequel les musiciens ont composé leurs morceaux, très important dans le milieu stoner/grunge, ne déshonore pas celui des cadors de la profession. Et si Root parvenait à se frayer un passage sur les sentiers menant à la notoriété, qu’il ne perde jamais cet état d’âme qui fera toujours la différence entre l’authentique et le trafiqué. Toute forme de constatation converge vers le fait que "Personality Disorder" se complait dans l’authentique et ne peut, par conséquent, pas foncièrement décevoir les amateurs d’un rock sombre, turbulent mais néanmoins chaleureux.