Relativement méconnu du microcosme métal, Stevie Salas n’est pourtant par avare en productions et collaborations en tout genre. En effet, le californien a ainsi été guitariste au service de Georges Clinton, et a participé aux tournées de Joe Satriani, de Rod Stewart et écrit des chansons pour plusieurs artistes dont Glenn Hughes pour lequel il a aussi produit l’album The Way It Is.
Ajoutez à cela une créativité assez débordante depuis son premier album Stevie Salas Colorcode en 1990 avec 18 productions entre les bootlegs et les lives et vous aurez une idée du personnage.
L’album objet de notre chronique, celui grâce auquel votre serviteur a connu ce guitariste, est Back From The Living sorti en 1996. Classé album du mois dans feu Guitar&Bass du mois de septembre 1996 (devant le Fire Garden de Steve Vai) son achat s’imposa de lui-même et ma fidélité pour cet album est totale encore aujourd’hui.
Ce joyau métal-funk nous permet également de retrouver T.M Stevens à la basse, et Brian Tichy (Billy Idol, Pride&Glory) à la batterie, ainsi qu'une multitude de percussionnistes et de vocalistes. Stevie, quant à lui, s’occupe du chant et des guitares. Et dans chaque morceau il y a au minimum deux guitares pour soutenir la mélodie ou la rythmique. Stevie Salas est un Tom Morello poussé à l’extrême. Savant dans le choix de ses guitares, dont sa collection est impressionnante, comme dans l’utilisation géniale des effets dont il raffole. Ce disque est une mine d’or pour les amoureux des rythmiques incandescentes et de sons de guitares originaux.
Concernant la musique, c’est un cocktail à forte dose de groove qui domine. TM Stevens et Brian Tichy imprime une rythmique infernale pour un rendu exaltant. On prend un pied phénoménal avec « Tell Your Story Walking », « Start Again » ou « Without Love » dans lesquels le slap de Stevens et les fills de Tichy claquent aux oreilles. Les refrains sont très mélodiques et souvent agrémentés de chœurs. Salas excelle dans les mid-tempos comme avec le magnifique « I Once Was There » qui débute avec guitare acoustique, nappes de claviers et voix suave, pour ensuite accélérer sur un refrain hautement mélodique et entraînant. Dans le même genre « Wonderin’ » ou « The Lying Truth » font partie des grands moments du disque.
Stevie Salas laisse parler son côté Prince avec « A Journey In The Middle Ages », une ballade dans l’esprit du « Purple Rain » du nain de Minneapolis. Et une des grandes forces de Stevie est sa qualité de chant pour aborder les titres rock-funk dans lesquels il faut lâcher les chevaux, aussi bien que les ballades pour lesquelles la douceur est de mise.
Le génie de Stevie Salas prend toute sa mesure dans une reprise d’un morceau de Joni Mitchell, « Amelia ». Cette chanson est un hommage à Amelia Earhart, aviatrice pionnière de la traversée de l’Océan Pacifique et ayant tragiquement disparue. La version de Mitchell est splendide mais celle de Salas est bouleversante. Stevie retravaille le morceau en y ajoutant des effets de guitares très bien pensés et de discrètes percussions. Sa manière douce et expressive de chanter propage une émotion intense qui trouve son apogée lors du solo très torturé et déchirant. Impossible de rester de marbre à l’écoute de ce chef d’œuvre.
A l’évidence cet album peut ratisser large pour contenter le maximum de désirs. Les amateurs de guitaristes virtuoses trouveront leur compte avec des rythmiques et des soli à l’apparente simplicité mais à l’efficacité redoutable. Stevie Salas ne fait pas un étalage excessif de sa technique mais on sent qu’il en a sous la pédale. Les amoureux de groove à la Extreme ou Glenn Hughes seront nécessairement rassasiés et les chineurs de musique rock sincère et expressive contentés.