La Lanterne du Village est à peine éteinte après une tournée couronnée de succès et un passage remarquable à l'Olympia (voir à ce sujet notre chronique du DVD Paris Moon), que le duo star de la musique électro-médiévale nous revient avec son 7ème album studio, poursuivant un Voyage musical de moins en moins Secret à travers les époques. Pour les plus jeunes de nos lecteurs, il convient de rappeler que le talentueux et caractériel multi-instrumentiste Ritchie Blackmore, compagnon à la ville comme à la scène de Candice Night, blonde souriante à la voix suave, fut au cours du siècle dernier un des plus talentueux guitaristes de hard-rock de la planète, illuminant de sa présence les carrières de Deep Purple et feu Rainbow. Et puis, l'amour aidant, notre fougueux guerrier électrique s'est transformé en barde médiéval, accommodant à sa nouvelle sauce les compositions et reprises qui jalonnent le parcours de Blackmore's Night depuis plus de 10 ans.
Avec ce nouvel opus, le groupe continue sa route, sans réelle surprise musicale, proposant sa traditionnelle reprise issue d'un ancien groupe du maestro, en l'occurrence la ballade Rainbow Eyes créée par … Rainbow ! Dans le même filon, on notera également une adaptation dynamique et rafraîchissante du Can't Help Falling in Love de UB 40. Comme d'habitude, les titres reprennent des morceaux issus de la Renaissance et du Moyen-Age, ou bien sont composés "dans le style de". Le tout est servi par une multitude d'instruments anciens ou modernes, et joués à la perfection par les différents intervenants, Ritchie Blackmore agrémentant le tout de quelques interventions lumineuses aux guitares acoustique et électrique.
Ballades suaves, jamais ternes, mettant en avant l'extrême beauté de la voix charmeuse de Candice Night (Gilded Cage ou Sister Gypsy), ou titres enjoués incitant à la danse de cour (le splendide The Circle, ou encore Peasant's Promise) : tout le registre habituel du groupe se retrouve sur cet album. Les musiciens s'autorisent même un passage par le folklore juif, avec un Toast to Tomorrow digne de la bande son de Rabbi Jacob !
Par rapport aux précédentes productions du duo, on notera également une présence importante du violon qui vient compléter à merveille un univers sonore pourtant déjà bien riche. Il manque toutefois le petit grain de folie présent par exemple sur Fires at Midnight, où Ritchie Blackmore retrouvait le punch de ses jeunes années dans un solo de guitare dantesque, ou encore les envolées instrumentales présentes dans l'interprétation live du passage récent à l'Olympia. Seul Locked Within the Crystal Ball, adaptation d'un "tube" du Moyen-Age, utilise à merveille ses 8 minutes pour dérouler une énergie communicative, et laisser une place de choix à la guitare magique de notre ombrageux de service.
Continuant les sorties d'album à un rythme plutôt soutenu, Blackmore's Night poursuit son bonhomme de chemin, sans surprendre les habitués de la maison, mais sans décevoir non plus. Dans le domaine sportif, on considère souvent que le plus compliqué n'est pas d'arriver à haut niveau, mais bien de s'y maintenir. Avec Secret Voyage, on peut considérer que le contrat est une nouvelle fois rempli : les novices seront séduits par la performance de l'ensemble, tandis que les habitués retrouveront avec plaisir leurs héros favoris dans des aventures certes sans surprise, mais d'une qualité musicale à même d'engendrer ni déception ni lassitude.