Après un "Skyscraper" époustouflant, ce troisième album de David Lee Roth a le malheur de voir partir deux de ses éléments moteurs que sont Steve Vai et Billy Sheehan. Diamond Dave décide alors d'engager Jason Becker, un autre nouveau petit génie de la six cordes fraîchement élu guitariste de l’année 1990 par Guitar Magazine, et également connu pour sa collaboration avec Marty Friedman dans "Cacophony".
Si le départ de Steve Vai ne se remarque donc pas en termes de virtuosité, c'est plutôt au niveau des compositions que la différence se fait sentir. En effet, alors que le protégé de Frank Zappa avait laissé son empreinte sur chaque album de David Lee Roth, l’apport de Jason Becker s'est limité à l’écriture des deux derniers titres de l’album que sont 'It’s Showtime !' et ' In The Bucket', excellentes compositions au demeurant, faisant presque regretter cette faible contribution ! Il en ressort un certain manque d’efficacité. Pire ! l’album comporte quelques longueurs, un comble quand on sait que "A Litte Ain’t Enough" est l’album le plus long de la discographie de David Lee Roth.
L’énorme enjeu était de succéder à deux chefs d’œuvre du hard rock avec la contrainte supplémentaire de devoir le faire avec un effectif remanié de moitié, Gregg Bissonette étant le dernier rescapé de l’époque dorée rejoint pour l’occasion par son frère Matt à la basse. Challenge relevé partiellement car "A Little Ain’t Enough" est un album particulièrement accrocheur dans lequel le fabuleux frontman prouve qu’il n’a rien perdu de sa folie. Il nous éblouit comme jamais sur les titres dans lesquels Jason Becker nous fait grâce de quelques soli bien sentis comme le titre éponyme, 'Last Call', 'Baby’s On Fire' ou le monstrueux 'It’s Showtime !'. En outre, David Lee Roth nous envoute avec sa voix chaude non pas en la jouant crooner comme sur les précédents albums mais plutôt version bluesy comme sur 'Tell The Truth' ou 'Sensible Shoes' avec son harmonica.
Avec l’aide de Bob Rock aux manettes, David Lee Roth revient aux bases du rock avec un album plus roots, plus bluesy par moment se démarquant du métal aérien des précédentes productions. Une prise de risque nécessaire pour mieux rebondir, et on peut dire qu’à cet égard, ce "A Little Ain’t Enough" s’en sort avec les honneurs. Et bien qu’il ne restera pas dans les annales, cet effort sera d’autant plus apprécié à sa juste valeur en raison du fait qu'il restera l’un des trop rares témoignages de Jason Becker qui, à l’issue de cette sortie, se verra diagnostiquer une sclérose latérale amyotrophique qui stoppera nette sa carrière…