Venus du Brésil, où le progressif est un genre assez prisé (voyez Cast ou Aether), Cartoon produit ici son troisième album, après un Martelo combinant rock, rythmes sud-américain et classique, puis un opéra-rock sur le thème des Chevaliers de la Table Ronde (Bigorna, qui remonte à 2002). Avec cet Estribo, le groupe continue à piocher dans des influences fort diverses, allant du classique aux précurseurs du prog (Genesis entre autres), en passant par les Beatles.
Ce mélange donne, comme on peut s’y attendre de la part d’un groupe sud-américain, par essence peu porté à la mélancolie, un résultat plutôt déjanté, perceptible dès le morceau d’entame, joyeux et foutraque. Les limites se font pourtant assez vite sentir, avec une utilisation assez datée des claviers (Remember), des choeurs en place mais bloqués quelque part au temps des Beatles, et surtout une batterie volubile, parfois envahissante (Crossing And Crosses) mais parfois aussi hors-temps (quelques ratés dans Remember). La complicité des musiciens est très palplable (Heaven’s My Home, ou The Car Crash, résolument ... cartoon avec ses bruitages), mais le résultat final est handicapé par une production manquant parfois de mordant : par exemple, Treatment With Mercury, pas assez rugueux, passe à côté de son sujet.
L’entreprise sympathique de nos brésiliens est donc entachée de petits défauts qui limitent leur propos. Dommage, car le chanteur Bhydhu possède un joli grain de voix et l’éclectisme de l’inspiration peut produire de jolies étincelles, à l’image d’un God Speed bien évolutif voguant d’un orgue Genesis à un piano jazzy en passant par un break latino, ou Velut Luna, bien équilibré (pour les curieux, l’esraj utilisé ici est une vielle originaire des Indes - à ne pas confondre avec une vieille Indienne). Cette capacité à sauter d’un univers à l’autre peut rappeller les Californiens de Mr Bungle, mais l’ensemble reste un peu trop léger pour réellement emballer l’auditeur.