La France regorge de groupes de qualité qui, malgré l’injuste ignorance médiatique dont ils sont victimes, continuent de prêcher la bonne parole blues-rock contre vents et marées. Les girondins de Double Stone Washed arpentent les routes de France et des pays voisins depuis 1991 et pourtant, ce superbe opus paru en 2007 est passé complètement inaperçu. Voilà qui est à la fois incompréhensible et inacceptable ! Il est donc grand temps de rendre à ce groupe, ainsi qu’à cet album, l’hommage qu’ils méritent.
Car c’est un recueil de petits bijoux blues-rock que DSW nous sert avec cet opus éponyme. En dehors d’une reprise, revisitée sous l’effet de fumées colorées, du « Spoonful » de Willie Dixon, seul point faible de l’album malgré son originalité, les jumeaux Villafagne et leur frère adoptif, Lilian Descorps, nous offrent 12 compositions, à la fois variées et finement ciselées. Les compères réussissent à parfaitement marier la propreté de la production et l’énergie rocailleuse propre au style dont ils brandissent fièrement les couleurs en en parcourant tous les recoins. Ainsi, si le début de l’album donne dans un blues-rock graisseux et puissant (« Stammering Days », « Naked Life »), les autres composantes du styles sont toutes abordées avec autant de réussite. Que cela soit dans un registre boogie (« Shaggy Dog Story »), pub rock (« Come On ») ou rock’n’roll (« Let The Dogs Out »), DSW réussit toujours a dégager l’émotion correspondante et à tisser l’atmosphère adéquate.
L’ombre des grands noms du genre n’est jamais bien loin, mais sans jamais être prédominante. C’est ainsi que tout à tour, ZZ Top (« Checkpoint Boogie »), Calvin Russell (« Poor Little Thing »), John Lee Hooker (« Many People »), voir les Stray Cats (« Stowaway ») viennent à l’esprit. Mais c’est bien de références qu’il s’agit, et en aucun cas de plagiat, car les Double ont depuis longtemps construit leur propre identité. La voix rocailleuse de Lilian et son harmonica chaud et omniprésent, le jeu précis et varié de Franck et la basse ronflante et les chœurs de Fred tissent une toile dont il est impossible de sortir une fois nos oreilles prises dans leurs fils. En effet, il est difficile de laisser partir des potes avec qui l’on vient de traverser tant d’émotions. Que cela soit le sombre « Poor Little Thing », le joyeux « Come On » avec sa guitare sous reverb et son harmonica obsédant, l’étouffant « Many People », le délirant « Let The Dogs Out » avec ses aboiements canins ou le sautillant « Call The Doctor » au refrain explicite, aucun titre ne vous laissera indemne.
Alors bien sûr, il est plus facile de se vautrer dans la facilité des niaiseries dont nous inondent les ondes radios et télé, mais aucune de ses nourritures que nous qualifierons de fast-musique, ne vous apportera le centième de ce que quelques groupes nationaux peuvent nous offrir si l’on se donne la peine de faire quelques pas en dehors des sentiers balisés par d’obscurs tactiques commerciales. A vous de voir si vous trouvez plus de plaisir dans l’artistiquement consommable, aussi vite oublié qu’écouté, ou si vous préférez ressentir de véritables émotions en compagnies de véritables musiciens qui vous récompenserons sans limite des petits efforts que vous aurez fait pour aller à leur rencontre. Les Double Stone Washed font partie de ses artistes authentiques et généreux : qu’attendez vous donc pour les découvrir ?