Chez MusicWaves, nous commençons à bien connaître Robin Taylor dont le projet Taylor's Universe est déjà passé par deux fois à la moulinette de nos chroniqueurs. Ce multi-instrumentiste de talent marque une prédilection prononcée pour les compositions instrumentales plus ou moins mélodiques. J'avoue que j'étais resté assez circonspect à la lecture des chroniques précédentes et n'avais pas vraiment pris le temps de me pencher sur le "cas Taylor". Puis est venu ce "Isle Of Black" qui aura eu pour effet d'ajouter un nom à ma longue liste des artistes à découvrir plus en détail.
Tout est histoire de goût, chacun le sait, mais le créneau occupé par Robin Taylor, déjà fortement exploré par certains King Crimson, After Crying ou même le beaucoup moins connu Karda Estra, est intéressant dans le sens où il constitue une subtile potion mêlant habilement musicalité pure et expérimentations diverses qui, j'en conviens, peuvent rebuter.
Je me souviens des chroniques de mes amis Proggi et Tarjy mettant en avant les bonnes idées qui commencent les albums de Taylor's Universe et lui reprochant dans le même temps les gâchis qui émaillent la fin de chacun de ces mêmes albums.
Ici, la bonne surprise pour moi est justement que Robin Taylor suit toujours la même ligne : la première moitié de l'album est une suite de morceaux à la durée standard, tous axés sur la mélodie bien que très travaillés en termes d'ambiance. Le morceau "Swingers", en particulier, nous replongeant avec délice dans les clubs de jazz des années 50 et donnant carte blanche à un saxo endiablé, vaut à lui seul qu'on s'arrête sur cette production. Sans oublier l'enchantement que m'a procuré personnellement cette voix aérienne sur le planant "Johannesburg".
Et pour respecter sa construction de prédilection, Robin Taylor nous livre un "Isle Of Black" encore fortement mélodique, bien qu'assez "pêchu", avant de passer à l'autre propos qu'il affectionne : le "grand n'importe quoi" (comme l'appelle l'un de mes amis chroniqueurs de Music Waves qui ne m'en voudra pas, j'espère, de le citer sans pour autant le dénoncer).
Je m'explique : si le morceau "Mind Archeology" est effectivement très difficile d'accès mélodiquement parlant, Robin Taylor se permet en plus d'étaler sur plus de 9 minutes des idées qui auraient pu être développées en à peine 30 secondes. Qui plus est, ces développements interminables sont construits sur une accumulation de dissonances et d'improvisations, ne laissant une petite place à des mélodies que durant les deux dernières minutes.
Soumis à ce régime, soit on ne tient pas 9 minutes, soit on ressort groggi en espérant une fin reposante. Mais comme à son habitude, Robin Taylor termine sur le même propos avec un "Izmit" incompréhensible. Oui, "incompréhensible" est le seul terme qui me vient à l'esprit pour qualifier ce titre. Je l'ai donc pris sans essayer de comprendre, avec mon coeur plutôt qu'avec ma tête et le constat est simple : "Izmit" ne peut qu'énerver ou enchanter, tout dépend du contexte dans lequel il est écouté et de votre état d'esprit. Un morceau épuré, monotone, répétitif, qui s'étale sur plus de 11 minutes alors qu'ici encore, tout aurait pu être dit en 2 minutes à peine.
Je comprends donc mes accolytes agacés par les délires de Robin Taylor et j'avoue que pour ma part, j'aurais certainement eu la même réaction dans un passé pas si lointain. Les goûts évoluent, Robin Taylor est gonflé et a juste eu la chance, en ce qui me concerne, de tomber à un moment où sa musique me parle. Avec des artistes comme ceux-ci, la subjectivité d'une note prend toute sa dimension. Plus que jamais, ce 8 ne fera pas l'unanimité mais aura le mérite d'attirer l'attention sur un artiste hors du commun qui aura vite fait de vous charmer ou de vous insupporter mais qui ne vous laissera pas indifférent.