Voilà un disque qui fût assez compliqué à chroniquer. Travail délicat donc et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, car il est complexe, technique, touche à plusieurs domaines musicaux, et qu’il faut l’écouter avec attention (évitez donc de plancher en même temps sur la suite numérique de la bachelière de la famille pour lui prouver que vous avez de beaux restes). Deuxièmement, car il est de ce fait trompeur. En effet, à la première écoute nous sommes tentés de nous diriger d’un pas résolu vers la benne à ordures, puis après plusieurs tentatives, nous oublions la décharge, et nous nous étonnons d’avoir encore l’opus en main.
Il faut sacrément être au courant de l’actualité musicale pour connaître les deux protagonistes de cette aventure qu’est Factory Of Dreams. En effet, le Portugais Hugo Flores n’est pas vraiment un collectionneur de couvertures de la presse Rock, même s’il possède à son actif trois albums solo ("Hugo Flores" en 1998, "Prospective" en 1999 et "Atlantis" en 2000), deux albums avec Sonic Pulsar ("Playing The Universe" en 2003 et "Out Of Place" en 2005) et deux avec Project Creation ("Floating World" en 2005 et "Down On Pyther" en 2007), deux concept albums baignant dans la Science Fiction. Il est multi-instrumentaliste et a donc pu se permettre de créer tous les sons sur ce disque de Factory Of Dreams. Son univers musical de prédilection c’est le Rock électronico-progressivo-industriel. Cet illustre inconnu fait toutefois figure d’idole des foules à côté de la Suédoise Jessica Lehto, qui n’a à son actif qu’une démo avec Once There Was ("Demons" en 2006). Elle chante, et son monde à elle, c’est le Gothique. Ils se « marièrent », en furent visiblement heureux et eurent beaucoup…de chansons. Onze en fait.
Ces progénitures ont généreusement profité des gênes de leurs parents. Ainsi, la musique de Factory Of Dreams peut être qualifiée de Rock Gothique à tendance électronique et industrielle. La voix de la belle est à rapprocher, parfois de celle d’une Tarja Turunen (ex-Nightwish), de temps à autres de celle d’une Sharon Den Adel (Within Temptation), et de temps en temps de celle d’une Sabine Edelsbacher (Edenbridge), d’où l’impact gothique. Quant aux instruments, ils la jouent tour à tour, Hard Rock ou Rock Prog, que cela soit la guitare (éthéré et planante), les claviers, ou… prise de tête, la batterie ! Et oui, il y a un bât qui blesse, car la batterie les amis, ce n’est pas la « drum-team », c’est une boîte à rythmes ! Monsieur Flores, vous l'avez trop joué Narcisse là ! Vous auriez pu tout de même vous fendre de quelques Euros et vous payer un batteur. Cette option aurait sans aucun doute permis à votre œuvre de revêtir de plus séduisants apparats. Au lieu de cela, l’écoute de "Poles" demande un nécessaire effort d’abstraction de ce tatapoum énervant, pour profiter des autres éléments sonores de l’opus qui, quant à eux, accrochent, façon « envoûtement », l’attention de l’auditeur pugnace et ouvert d’esprit.
Tout au long de ce concept-album qui nous emporte vers un univers imaginaire coupé en deux parties, l’une positive, l’autre négative (d’où la pochette), où le côté lumineux et son pendant sombre sont appelés les « pôles » (d’où le titre de l’album), et où règne un générateur d’illusion (d’où le nom du groupe : l’usine à rêves), le voyageur sous son casque-audio, croise la route d’Arjen Lucassen (Ayreon), d’Eloy, de Theater Of Tragedy et des groupes des susnommées chanteuses à voix.
Un curieux mélange certes, mais un patchwork intéressant pour celui qui saura oublier la métronomie de la batterie et plonger avec attention (et répétition) dans les méandres tortueux des délires sonores du père Hugo, aidé en cela par les envoûtantes mélopées de Jessica.