Si le terme "Red Mourning" n'est pas encore associé dans votre esprit à ce jeune combo français d'origine francilienne, il pourra évoquer pour certains la couleur du deuil des esclaves de la Louisiane. Ce rapprochement n'est pas anodin puisque leur musique rend en quelque sorte hommage aux acteurs de cette période difficile de l'histoire en associant à la rage du hardcore l'aspect mélancolique du blues.
Après une démo et un EP sortis depuis 2004, le quatuor (composé entre autre d'un bluesman de culture straight edge, un ancien DJ et un percussionniste d'orchestre) concrétise sa participation avec "Time to Go" pour lequel Francis Caste (Zuul FX, The Arrs, …) se retrouve derrière les manettes.
L’alliance quelque peu singulière entre âpreté du hardcore et désinvolture du blues s’introduit dès "Come To Bury". Les harmonicas désabusés, semblant décharger un spleen palpable rencontrent alors les cordes métalliques des guitares et celles de Hoogendoorn. L’effet rendu par cette mise en bouche est plutôt convaincant : le chant éraillé répond au chant clair dans un bouillonnement surchauffé dont la moiteur est accentuée par ces harmonicas plaintifs. La lourdeur est de mise sur "Time To Go", une lourdeur orageuse et moite, portée par des riffs souvent percutants et un batteur irréprochable dans son martellement incisif à l'image de "Closer Yet" qui termine sa course effrénée sur un southern rock pesant pleinement exécuté.
Et même si certains titres restent dans un registre hardcore plutôt classique, preuve est faite que Red Mourning possède d'ores et déjà sa propre identité. L'éponyme "Time To Go", sans doute le titre le plus réussi de l'album, est d'ailleurs le parfait exemple de ce que nos français sont capables. Sur presque six minutes, il délivre crânement un concentré de nervosité et de gravité plantant un décor élégiaque très marqué.
Avec ce premier album, Red Mourning affiche fièrement, le poing levé, des convictions musicales qui s’avèrent efficaces, énergiques et qui donnent à penser qu'ils devraient s’attribuer dans le futur une bonne place sur le devant de la scène hardcore hexagonale, et souhaitons-leur, internationale.