Quelques mois après Warrel Dane, chanteur émérite des américains de Nevermore, c'est au tour du guitariste virtuose Jeff Loomis d'annoncer la naissance de son premier bébé musical en solo. Quand on connait la discographie du bonhomme entre death et trash de haute volée, il serait plutôt étonnant de voir débouler un album sortant de ce précieux registre.
Autant lever le voile dès à présent car " Zero Order Phase " est à peu de chose près une bande son de Nevermore sans le chant de Dane. A ce niveau là, aucune véritable surprise est notable si ce n'est la participation pour l'occasion de quelques pointures de la profession tels que les guitaristes Pat O'Brien (Cannibal Corpse) et Ron Jarzombek (Watchtower ) ou encore le bassiste jazz Michael Manring. Pour sa part Neil Kernon (Nevermore, Cannibal Corpse, Deicide) aura la tache du mixage tandis que Mark Arrington (Ex-Nevermore) assurera les parties de batterie.
Vous voilà avertis, la teneur en transgression par rapport à un modèle bien connu sera injectée à doses homéopathiques, même si une certaine accalmie sur certains titres est de mise laissant la part belle à des moments plus poignants ou à quelques soli de basse ("Cashmere Shiv"). Dans tous les cas, avec un tel touché, cette facilité à jouer un demi-millier de notes par minute, Loomis met la barre technique très haut, intégrant des structures progressives complexes et mêlant parfois plusieurs plans de guitares qui en laissera rêveur plus d'un.
De son côté, l'atmosphère qui se dégage de l'album se rapproche sensiblement de celle des travaux de son combo d'origine. L'ambiance y est tantôt ténébreuse, tantôt malsaine et ce dès le " Shouting Fire At A Funeral " introductif (le titre parle de lui-même…) qui est non sans rappeler certains titres de " This Godless Endeavor " ou sur " Opulent Maelstrom ", qui pourrait exprimer sur la forme la folie comme un certain état dépressif. Dans tout ce plaidoyer contre l'apathie, d'autres titres échappent pourtant aux soubresauts tonitruants en évoluant vers de fluides envolées de guitares et son cortège d'arpèges (" Azure Haze ", " Sacristy "), permettant du même coup de reprendre ses esprits dans ce déluge sonique de presque une heure.
Peu des choses à redire au final concernant " Zero Order Phase " quand on a passé le cap de la digestion de ce bouillonnement guitaristique en totalité instrumental. Si ce n'est le mielleux " Departure " vraiment dispensable, les compositions du Lucky Luke à la Schecter (sa nouvelle sept cordes) affirment une nouvelle fois son talent et sa technique impressionnante.