Les 25 et 27 juin 1972, Led Zeppelin délivre une performance éblouissante à Los Angeles avec pour seul témoin un bootleg du 25 au son par définition imbuvable, nommé "Burn Like a Candle". En 1980, après avoir englouti une piscine de vodka, le batteur John Bonham décède et met la planète Hard Rock en deuil. Sa mort signe la fin d’un des plus grand groupe de scène, qui ne laisse en héritage que le controversé "The Song Remains The Same" pour faire vibrer les nostalgiques et râler les puristes.
Alors évidemment lorsqu’en 2003, Jimmy Page ressort les bandes du bootleg de son chapeau pour en faire un triple album live, on se demande : pourquoi seulement maintenant ? Il est dès lors tentant d’y voire une petite tentative de faire pondre à nouveau la vieille poule aux œufs d’or afin de récolter du blé. Ce charmant scénario champêtre tombe néanmoins en morceau lors de l’écoute de ce triple album…
Le vieux sorcier ne s’est pas moqué de nous, et ce qu’il a réussi à faire des vieilles bandes tient effectivement de la magie. Le son est clair et net, et permet à chacun des instruments et à la voix de Plant de s’exprimer totalement. L’énergie de la prestation est bien mieux rendue que sur "The Song Remains The Same", qui prend un gros coup de vieux au passage. Le travail post concert est donc énorme et le seul obstacle sur l’escalier vers le paradis musical serait une mauvaise interprétation de la part du géant, chose peu probable au vu de la date, 1972.
L’introduction pas très utile nommée 'LA Drone' ne nous laisse même pas le temps de nous assoir confortablement dans notre siège qu’'Immigrant Song' nous en expulse. Le choix de cette chanson pour attaquer est extrêmement judicieux et le solo monstrueux de Page ne présage que du bon, soutenu comme d’habitude par tous ses compères parfaitement en place. Les titres qui s’enchainent montrent de plus en plus un Led Zeppelin en totale liberté qui joue à fond ses compositions pour délivrer le meilleur d’eux même.
Et le meilleur est atteint. 'Since I’ve Been Loving You' est transcendée par le chant magique de Plant, ainsi que tous les titre du III, parfaitement à leur place pour tempérer les orages que sont les 'Black Dog', 'Heartbreaker' ou 'The Ocean'. Tous ces titres révèlent leur énergie incroyable à un point rarement observé dans le milieu musical. 'Stairway To Heaven' est jouée dans un silence de cathédrale et s’élève à un niveau métaphysique de beauté. Et que dire des improvisations jouissives de 'Moby Dick', 'Whole Lotta Love' et 'Dazed and Confused' (1h10 à elle trois) sur lequel chaque membre semble jouer pour la musique, sans se soucier de partition, de ventes et de querelles.
La guitare de Page et le chant de Plant donnent à l’auditeur ébahi des sensations presque érotiques rarement ressenties sur de la musique. Les membres de Led Zeppelin se complètent comme jamais, chacun se laissant aller sans retenue, et donnant naturellement à l’autre la place qu’il lui faut. Plant et Page sont les deux tourelles d’un même char d’assaut dont Bonham et John Paul Jones sont les chenilles implacables. "How The West Was Won" est le live que tout amateur de Hard Rock se doit d'écouter.