Pour ce cinquième album, les Canadiens d’Into Eternity s’essaient au concept album et pour l’occasion, le leader guitariste/co-vocaliste, Tim Roth a choisi d’évoquer un thème particulièrement sensible qui l’a personnellement touché à savoir le cancer, maladie qui a, tour à tour, emporté dans un laps de temps très court, deux des ses meilleurs amis et son père.
L’intro semi-acoustique « Prelude To Woe », comme les Canadiens aiment les faire, nous plonge dans le cœur du concept douloureux, juste avant d’agresser l’auditeur de leur prog-death hyper rythmé aux riffs et blasts énormes. Une musique étourdissante aux changements de rythme incessants, accompagnés d’autant de changements de vocaux tantôt death, black… et clairs aux tessitures différentes, mais le plus souvent assimilables à ceux du groupe métal prog symphonique, Shadow Gallery. Une riche recette éprouvée qui nécessite une attention de tous les instants de l’auditeur, au risque de se laisser submerger par l’avalanche vertigineuse de notes et donc, de se perdre dans ce dédale de changements !
A l’évocation de cette description, ceux qui suivent les Canadiens depuis leur début pourraient donc croire que c’est là où le bat blesse dans le sens où le contenu musical proposé par le combo, depuis le fameux « Buried In Oblivion » notamment, n’a pas varié d’un iota. A se demander si la force de ce style, qui lui est si spécifique, résidant dans cette richesse de sons et tessitures et leur mariage si propre à Into Eternity, ne pourrait pas devenir une faiblesse tant il est identifiable entre tous ! Certains pourraient donc conclure que le groupe a trop exploité un filon maintenant épuisé !
On aurait pu écrire, voire penser tout ceci, mais la force du sujet traité fait que ces effectifs défauts résidants dans un manque criant de renouvellement est largement compensé voire totalement occulté ! En effet, le concept s’empare de vous telle la fatale maladie évoquée ! En d’autres termes, ce thème poignant couplé à la musique d’Into Eternity est d’une efficacité indéniable avec comme paroxysme l’émouvant titre acoustique éponyme découpé en trois périodes qui prend aux tripes avec l’alternance de monstrueux titres death progressif comme le monumental « Diagnosis Terminal » mettant en exergue la rage qu’on peut ressentir à l’évocation d’un tel diagnostique fatal ou encore « A Black Light Ending » avec son intro imparables et aux harmonies de guitares entêtantes …
Si on pouvait mettre en question la capacité de renouvellement musical (à défaut du personnel enregistrant l’arrivée du guitariste Justin Bender et du batteur Steve Bolognese) du combo après un « The Scattering Of Ashes » donnant un début d’essoufflement, Tim Roth se livre totalement pour ce quatrième opus et ça se ressent… A tel point qu'on touche parfois le magnifique comme il l'avait précédemment atteint sur « Buried In Oblivion » et notamment l'enchaînement du titre éponyme et « Black Sea Of Agony ».