Est-il encore nécessaire de présenter Dream Theater (DT)? Ce groupe, probablement cité sur 95% des chroniques de Metal Progressif, représente la référence dans ce domaine, et tous ceux qui lisent cette chronique le savent déjà. Pourquoi une phrase d'introduction pour citer de telles évidences ? Pour justifier une certaine grogne qui s'est emparée de moi lors de la vision de ces DVD, et notamment du premier, le plat de résistance, la partie concert.
Après la sortie du très bon Systematic Chaos, DT est parti en tournée. Plus précisément du 3 juin 2007 au 4 juin 2008. Une flopée de chiffres accompagnent les dossiers de presse avec pour objectif de mettre en avant la popularité du groupe, son importance et donc, finalement, de vous inciter à acheter ce coffret de 2 DVD, voire de 2 DVD + 3 CD. Soit. Mais avant d'aller plus loin dans la découverte de tout cela, un coup de gueule : l'image proposée est d'une qualité proprement scandaleuse pour un groupe dont on vient de voir qu'il a les moyens ! Est-ce le mauvais éclairage de la scène pour un tournage vidéo qui est en cause ? Des moyens limités car les concerts étaient filmés tous les soirs ou presque (on va y revenir) ? Ou encore une volonté de faire amateur (je n'y crois guère) ? Bref, l'image est pauvre, le concert est filmé de façon discutable avec des mouvements de caméra laissant croire à un bon bootleg. Et comme la compression est importante, il y a parfois des effets de pixellisation ("Surrounded" ou "In the Presence of Enemies" par exemple). Mais il fallait faire tenir 187 minutes d'images, avec 2 pistes sonores (stéréo et 5.1) et un bonus caché sur une face (monocouche). Précisons enfin que le son n'est pas à tomber !
La partie concert donc (DVD 1). Il ne s'agit pas, comme d'habitude avec ce groupe, d'un concert filmé dans son intégralité, mais d'une compilation de morceaux filmés dans différentes salles lors de la tournée (toutes les citer seraient rébarbatif et inutile). De plus, les titres ne s'enchaînent pas tous, mais sont entrecoupés d'interviews, d'images backstage ou autres. Ce n'est pas forcément désagréable, ça change un peu du classique concert filmé, et on peut imaginer que les prestations choisies sont les meilleures de celles qui furent filmées. Il faut d'ailleurs reconnaitre que les interprétations sont irréprochables, très professionnelles (trop ?) et ne souffrent d'aucune approximation. Nous avons là des habitués de la scène, qui tournent depuis si longtemps qu'ils sont rodés. Et comme ils sont très sérieux lorsqu'il s'agit de musique, les membres de Dream Theater ne se moquent pas de nous quand ils jouent. Les séances d'échauffement (au sens strict du terme pour John Petrucci qui chauffe les muscles de son avant bras droit à l'aide d'un tissu spécial…) en attestent, ces musiciens respectent leur public, leur métier et leur art.
La set-list couvre l'essentiel de la carrière du groupe, sachant qu'aujourd'hui, DT a bien trop d'albums à son actif pour détailler chacun d'eux. Systematic Chaos se taille la part du lion, tournée promotionnelle oblige. Après avoir visionné tout le 'concert', plusieurs constats peuvent être faits. Détaillons un peu.
- Dream Theater est LE groupe de Metal Progressif par excellence. Il a inventé le genre, l'a fait vivre et évolué, et ses concerts le prouvent, il reste une référence incontournable.
- Le niveau technique respectif de tous les membres du groupe les met à l'abri de tout problème sur scène. Et même si James Labrie peine un peu dans "Surrounded", il faut admettre que le groupe est aussi à l'aise qu'il est possible durant les presque 3 heures de représentation.
- La concentration dont les musiciens ont besoin pour jouer correctement limite le côté show de leur part, ils font donc appel à quelques artifices pour embellir le spectacle (projections essentiellement). C'est le lot de beaucoup de groupes techniques…
- Les covers dont DT est friand sont ici portion congrue. A l'exception de "Surrounded" qui intègre en son sein un extrait de "Sugar Mice" de Marillion et de "The Wall" de Pink Floyd, on décèlera une allusion à Rush dans l'intro du "Schmedley Wilcox". C'est tout !
- La tournée a du être particulièrement éreintante car John Petrucci ne montre pas un enthousiasme débordant, il semble avoir un peu d'embonpoint (tout comme James Labrie, qui pourtant nous informe dans les bonus qu'il s'entretient tous les jours) et être fatigué.
Au chapitre des vrais bons moments de ce DVD 1, les titres 'de Systematic Chaos', les duos John Petrucci-Jordan Rudess, les crachats de Mike Portnoy et, cerise sur le gâteau, les premiers mots de John Myung. A noter l'absence de Metropolis - Part I (entre autres), ce qui est une surprise. Mais tous les titres joués par DT ne sont pas sur le DVD, et ils ne jouaient pas la même set-list d'un soir à l'autre (Home manque cruellement sur ce DVD, alors qu'ils jouaient ce titre durant la tournée).
Bref, ces "180 Minutes Around the World" sont un mélange de bonne musique et de nombreux agacements. Quid du DVD 2, celui des "bonus" ?
A la fois complet et sans réelle surprise, c'est un bon disque de bonus. Une présentation des cinq musiciens par le groupe lui-même (chacun parle des quatre autres). Une présentation de l'équipe qui tourne avec le groupe, ce qui montre un certain respect pour ces hommes de l'ombre (il n'y a aucune femme dans cette équipe). Le reportage sur l'avant-show et le pendant-show nous montre ce qui se passe derrière quand nous spectateurs attendons et regardons le concert.
Les compléments vont de moyennement intéressants à assez intéressant. Les vidéos diffusées sur scène de 3 titres, quelques clips de titres extraits de 'Systematic Chaos' et une visite de la scène et des coulisses par Mike Portnoy (très sympa). Pour finir, une galerie de photo (dans laquelle vous verrez les musiciens, de dos, saluer le public dans de nombreuses salles). Attention, aucun sous-titre n'est proposé. Quand on vous dit qu'il faut bosser l'anglais à l'école…
Un coffret riche, avec un emballage très joli, une volonté d'en montrer un maximum, des gens sympathiques, amusants, professionnels, mais un produit gâché par un niveau technique sans rapport avec toutes ces qualités. Il manque aussi dans le 'concert' le frisson qui va nous faire revenir sur le DVD à maintes reprises, le montrer aux potes et commenter à n'en plus finir le passage qui nous fait tant plaisir. Dommage, DT pouvait faire nettement mieux. Sur ce, je vais boire mon "Rock Juice" (Cherchez le bonus caché du premier DVD) !