Une pochette sobre, avec l’image, centrée dans un cadre beige (noir pour les heureux possesseurs de la réédition), d’un groupe à l’œuvre. Attention ici pas de frontmen au regard d’acier ni de guitar hero suant dans une belle lumière. Non, c’est dans son fatras d’instruments et du point de vue d’un spectateur en fosse que le groupe Deep Purple, dont chacun connaît pourtant la mégalomanie, est présenté sur la pochette du désormais mythique "Made In Japan".
Cette pochette à l’apparence simple est extrêmement révélatrice de la dimension prise par la dizaine de chansons qui furent jouées à Osaka, les 15, 16, et 17 août puis enregistrées sur ce disque. En effet, il convient de dire qu’une partie du génie qui compose cet enregistrement live vient de la capacité qu’ont eue les cinq membres du groupe à concilier, avec naturel, grandiloquence et sincérité.
Sincérité car le live est réalisé sans overdub, que le son est sec et râpeux, proche de la hargne d' "In Rock". Les interprétations sont furieuses, à l’image de Ian Paice, véritablement déchaîné, qui enflamme des titres comme "Highway Star" et bien entendu "The Mule". Le son est direct, et l’adjectif édulcoré qui pouvait parfois s’inviter dans les discussions sur "Smoke on The Water" n’est plus d’actualité. L’attaque de Blackmore sur le riff est aussi brute qu’un bloc de granit.
Grandiloquence par la construction des morceaux, l’orgue, le timbre distingué de Ian Gillan qui sont autant d’éléments donnant déjà ce coté baroque sur les album, et qui trouvent ici un rôle capital. L’orgue sur "The Mule" prend une dimension mystique, Gillan psalmodie comme jamais sur "Child In Time". Comment d’ailleurs ne pas s’extasier devant les improvisations virevoltantes de Blackmore et Lord sur ce même "Child In Time" par ailleurs magnifié ? Chaque morceau est allongé. Peu parfois, comme "Strange Kind of Woman", ou beaucoup, comme "Space Truckin’". Chaque petite excroissance n’est pas une nouvelle version du morceau, relevant en effet de la pure fantaisie live et nous ramène donc à la sincérité dont je parlais plus haut.
Mis à part quelques (très) rares faiblesses de Gillan, il n’existe aucun défaut sur ce disque. Les morceaux joués, qui font tout de même honneur à "Machine Head" puisqu’il s’agit de la tournée de promotion de ce disque, sont tous des hits de Deep Purple. Les interprétations qui en sont faites sur ce disque rendent sa possession par tout fan indispensable, même (et surtout) pour qui connaît par cœur les versions studios.