Tout le monde connaît ces insupportables séries américaines à la guimauve, peuplées de « je t’aime », « je ne t’aime plus », « je te quitte » et « je reviens ». La vie de certains groupes de rock n’est pourtant pas loin de ressembler à ces « sucettes », à commencer par celle des suisses de Krokus. Déjà marqués par des changements de line-up fréquents et réguliers, le quintet helvétique vit 4 de ses membres quitter le navire après le pourtant excellent « Heart Attack ». Malgré la volonté de Fernando Von Arb, seul survivant, de faire vivre le groupe coûte que coûte, l’épisode « Stampede » déboucha sur un échec. Heureusement, les 20 ans du combo donnent l’occasion à Marc Storace et Mark Kohler de faire leur retour pour remettre Krokus sur de bons rails.
Et le fait est que, soutenue par une section rythmique sans faille, la triplette historique nous offre d’entrée quelques titres du meilleur acabit. Bien sûr, l’ombre d’AC/DC plane lourdement sur « Flying Through The Night », mais il est maintenant temps de ne pas réduire l’identité du groupe suisse à celle d’un simple clone des légendes australienne. Bien sûr, la voix de Marc Storace donne régulièrement la sensation que Bon Scott s’est relevé d’entre les morts, et Fernando Von Arb nous sert régulièrement des riffs dignes des frères Young. Pourtant, en rester à cette simple approche serait bien trop réducteur pour refléter la réalité. Krokus est un bon groupe de hard-rock direct et festif et des titres comme « To Rock Or Not To Be » ou « Talking Like A Shotgun » réussiront à vous faire taper du pied et à vous redonner le sourire lors de vos moments de déprime. Et si cet album n’est pas parfait, il en recèle néanmoins quelques perles comme l’enjoué et entraînant « Natural Blonde », le provocateur au titre évocateur « You Ain’t Got The Gut To Do It » doté d’un refrain catchy en diable, ou surtout l’excellent « Wagon Gone ». Son riff est digne d’un rouleau compresseur et nous emmène le long des rails en nous faisant suivre le tempo d’un train. Début avec une monté en puissance, pleine vitesse, ralentissement puis relance, tout y passe, le tout renforcé par un refrain hyper efficace.
Dommage que Krokus s’encombre encore de titres un peu lourds et plombant la fin d’un album pourtant bien lancé. En effet, si la deuxième partie réussit à se relever de l’enchaînement du mid-tempo « Soul To Soul » et du lourdingue « Stop The World » aux effets vocaux frôlant le ridicule, le dernier titre (« Stormy Nights ») nous laisse un regrettable goût d’inachevé, voire de gâchis. C’est malheureusement un problème récurrent chez le combo helvète. La présence de certains titres confondant le heavy et la lourdeur vient régulièrement handicaper des albums aux qualités pourtant évidentes.
« To Rock Or Not To Be » redonne donc espoir en un avenir meilleur pour Krokus, mais nous laisse cependant sur l’impression d’un album trop inégal pour en faire une production incontournable de la discographie du quintet alpin.