Il est des annonces qui mettent la puce à l’oreille pourtant multi-éprouvée du chroniqueur. Ainsi celle faite sur le site officiel de Lion Records, concernant un de leurs nouveaux protégés, le groupe italien Farther Paint, qui “annonce une nouvelle ère dans le métal progressif européen”. Rien de moins… Avec une telle déclaration, le lecteur aborde l’écoute avec une méfiance digne de celle d’un okapi paranoïaque (l’okapi étant, comme chacun sait, un giraffidé particulièrement circonspect).
Renseignements pris, Farther Paint, né en 1995 de la complicité entre Francesco Federici (guitare) et Thomas Bianchi (basse). fait paraître 3 démos, acquiert son line-up actuel en 2006 avec l’arrivée de Gabriele Manocchi (calvier), le réembauchage de Luca Prima (batterie) et l’association avec Monia Rossi (chant). Lose Control est le premier LP du groupe.
Pour en revenir à la déclaration liminaire de Lion Records, la musique s’appuie sur une rythmique guitare saturée : nous sommes donc bien dans le métal. L’auditeur note une certaine variété de thèmes à l’intérieur des morceaux avec des transitions assurées de façon plus ou moins cohérente : nous sommes donc bien dans le progressif. Maintenant, pour ce qui est d’ouvrir une nouvelle ère, il faudra trouver une autre occasion ....
“Erreurs à tous les niveaux” pourrait être un sous-titre acceptable de ce Lose Control. Si le guitariste arrive à peu près à tirer son épingle du jeu - rapide, technique (Hold Me, Anger) quoiqu’un peu plat dans les passages shred, mais c’est le style qui veut ça - le bassiste ne surnage qu’en se réfugiant dans un anonymat salvateur. Les claviers, quant à eux, s’ils quittent le registre piano, se perdent dans les banalités ou bien s’encombrent de bidouillages bon marché (Anger).
Le métal à chanteuse est, paraît-il une valeur refuge. Monia Rossi garde, tant qu’elle reste dans un registre doux (Chains), des accents de Kate Bush, avec un timbre haut-placé, mais quasiment sans vibrato, et sans beaucoup de relief. Les choses se gâtent quand le ton monte, le timbre devenant plus nasillard, de sorte que, associé à une guitare très métallique, l’ensemble devient nettement acide. Certaines envolées sont complètement ratées comme sur Illusion in my Hands, avec sa fin particulièrement pénible.
Le meilleur est pour la fin : la batterie est l’évènement de cet album ! Oser utiliser une batterie électronique, par nature fort peu dynamique, sur une musique dont la rythmique se réclame du métal est pour les taquins une incitation au ricanement condescendant, et pour les grammairiens de la musique, un contresens grave. Luca Prima apporte ici sa touche personnelle avec brio, intégrant avec une originalité baroque la batterie Bontempi dans l’arsenal pourtant fourni des percussions métallisées.
Il est extrêmement difficile, à la fin de ce « Lose Control », de ne pas transformer ce qui doit rester une chronique en un billet d’humeur, un coup de gueule contre des bonnes idées mal utilisées. Car le fond de composition n’est pas absent, ce qui donne lors des écoutes un sentiment de gâchis certain, l’interprétation conventionnelle ou malvenue venant prestement torpiller toute velléité d'indulgence. Mais que fait la production ?