Avenged Sevenfold, à quoi cela vous fait-il penser ? Du Heavy FM amerloque en toc, couvrant son ignorance musicale avec des vociférations destinées à un public jeune et plein de haine contre un système dont ils profitent grassement ? La musique du pauvre ? Cliché facile. Pourtant, si l’on se penche sur le sujet, quelques éléments sont là pour confirmer la thèse du groupe vide. Origine et succès « made in U.S.A. » , look et visuels plutôt fâcheux, quelques albums flirtant allègrement avec le hardcore, et, cerise sur le gâteau, le pseudonyme ridicule du chanteur de la troupe (M. Shadows, même Nintendo n’aurait pas osé…).
Cependant, les choses ont changé depuis les premières productions hurlantes. Un accident du chanteur (une artère éclate dans son cou) amène le groupe à calmer le jeu et à se rappeler qu'Iron Maiden ou Guns n’ Roses font partie de leurs influences. Malgré tout, lorsque le groupe sort en 2007 un album éponyme (après huit ans de carrière !), ses chances de faire changer d’avis le mélomane inflexible sont maigres. Pourtant, une foi l’album lancé, il ne faudra pas longtemps pour convenir que la musique présentée est de qualité. Plus encore que le terme, un peu vague, de qualité, c’est l’authenticité de la démarche qui s’impose à l’esprit.
Alors certes, Avenged Sevenfold aime les refrains faciles, et s’appuie facilement sur la voix puissante de son chanteur pour délivrer des mélodies de bûcherons ("Almost Easy"). Ils ne sont ni les premiers, ni les derniers, et le font plutôt bien. Le chant est puissant et maitrisé, sachant être clair quand il faut, mais aussi plus hurlé (ce qui avait disparu sur "City Of Evil", l'album précédent). La batterie est puissante mais fluide, les guitares saturées en mettent plein les oreilles ("Critical Acclaim") tout en étant capables de soloter à cent à l’heure si le besoin s’en fait sentir ("Afterlife", "Scream"). Bref tout est réuni pour délivrer un album réussi.
Les américains ne rechignent pas non plus à utiliser des éléments moins habituels dans ce style de musique, tels que le piano presque pop sur "Almost Easy", plusieurs chants féminins ("Unbound", "A Little Peace of Heaven"…), ou le violon sur "Afterlife". Lorsque le temps vient de ralentir le ton, ils le font de façon intelligente sur "Dear God", avec une ballade qui dégénère progressivement, dans un festival jouissif de notes. Impossible de ne pas parler de "A Little Peace Of Heaven", véritable chef d’œuvre de dix minutes ou s’entremêlent violons, cuivres, piano, guitare, batterie enflammée, le tout dans une ambiance kitsch et glauque qui doit beaucoup à l’interprétation magistrale de M. Shadows. Ce morceau majestueux, aux allures de comédie musicale, a le double mérite de présenter un son résolument original tout en étant parfaitement mature et authentique.
Forcément, lorsque les morceaux sont plus conventionnels, l’intérêt retombe un peu. Ainsi des titres comme "Lost", "Scream" ou la fin de "Gunslinger" ne sont pas aussi enthousiasmant que d’autres tout en restant très correct. De plus, le son très puissant des guitares sature trop souvent et brouille certains passages qui auraient peut-être mérité une plus grande clarté sonore. Enfin, le chant de M. Shadows est omniprésent et mis en avant au mixage, ce qui fait qu’apprécier son timbre (très américain) est une condition sine qua none pour profiter pleinement de l’album.
Les quelques petit problèmes relatés ici ne sont bien entendu pas suffisamment importants pour vous empêcher de passer à coté de cet album qui devrait vous réconcilier avec Avenged Sevenfold, et c’est tant mieux car, qu’on le veuille ou non, ce groupe est peut-être en passe de se faire un nom dans le monde hostile du métal.