En observant aujourd’hui l’institution qu’est devenu Metallica, non seulement dans le monde du métal mais aussi plus largement dans la culture populaire américaine, il est difficile d’imaginer les débuts houleux du groupe. En effet, des années avant la reconnaissance ultime, les membres de Metallica voyagent dans de tristes conditions pour promouvoir leurs démos sur cassette, saccagent les lieux ou ils passent, et surtout s'entre dévorent. Heureusement la situation se stabilise finalement avec les renvois successifs de Ron McGovney et Dave Mustaine, remplacés respectivement par le génial Cliff Burton et le guitariste Kirk Hammett.
Leur premier album sera une autoproduction, puisque Jon Zazula crée le label Megaforce spécialement pour l'occasion. Les compositions sont issues des années de scène que Metallica a derrière elle, ce qui explique que Mustaine soit crédité sur "The Four Horsemen". Cet album marquera rapidement les esprits par sa rapidité d’exécution (une des raisons qui les empêchèrent de trouver un label). La plupart des titres sont des hits Thrash. De nombreux morceaux deviendront d’ailleurs des classiques ("Hit The Lights", "The Four Horsemen", "Seek And Destroy", "Whiplash"…). Les constructions sont variables, le groupe pouvant développer des structures intéressantes comme sur "The Four Horsemen" ou "Seek And Destroy", et à d’autre moment donner une impression de métal garage pas très loin d’un Motörhead (la chanson Motorbreath est d'ailleurs un hommage à ces derniers). Les riffs sont souvent très secs, râpeux mais paradoxalement, le groupe parvient à mettre beaucoup de mélodie dans une musique très agressive.
Bien entendu, tout n’est pas encore en place. James Hetfield éructe plus qu’il ne chante, et sa voix donne souvent une impression d’immaturité pas très loin de ce que la NWOBHM laissait parfois entendre, et elle subit donc beaucoup d’echo. Kirk Hammett, s’il délivre déjà de très beaux soli ("Motorbreath"), manque parfois de précision. De même, la basse de Cliff Burton sera bien mieux mise en valeur sur les opus suivants, même si chacun appréciera son solo sur "Anesthesia (Pulling Teeth)". Le son est d’époque, plutôt sale, renforçant ainsi l’ambiance brouillonne dégagée par l’album.
Malgré quelques défauts inhérents à son contexte, vous aurez bien compris que ce premier jet de Metallica envoie déjà du très lourd, augurant ainsi la belle carrière qui se dessine devant eux. Le style qu’ils viennent quasiment d’inventer, en reprenant les recette de groupes comme Venom, mais de manière plus extrême, propose une musique nouvelle, violente, agressive, et techniquement très aboutie. Le monstre est né.