A 60 ans, David Gilmour semble avoir atteint une certaine forme de plénitude. Le voir évoluer sur scène, comme aux alentours, en donne l'impression. Il maîtrise son art depuis si longtemps, avec une telle aisance, qu'on a l'impression que rien ne peut lui arriver. C'est le sentiment qui m'habitait tout au long du visionnage de ce concert organisé à l'occasion de l'anniversaire du syndicat Solidarnosc (26 ans). Concert joué devant 100.000 personnes toutes acquises à l'artiste, avec un orchestre de cordes réuni pour l'occasion, dirigé par l'ami de David Gilmour, Zbigniew Preisner, qui avait participé à la création du dernier opus en date du guitariste, "On an Island".
Comme souvent lorsqu'il se déplace, l'ancien guitariste de Pink Floyd rencontre les personnalités locales, ici le maire de Gdansk et surtout, Lech Walesa, qui lors des événements de 1980, était le président du syndicat Solidarnosc, puis fut président de Pologne de 1990 à 1995. Un petit retour historique pour situer ce concert symbolique qui était, qui plus est, le dernier de la tournée 2006.
Ce show est divisé en deux parties. La première reprend l'intégralité du disque "On an Island", la seconde des titres de Pink Floyd.
C'est en regardant et écoutant David Gilmour interpréter "On an Island" que le sentiment de totale maturité semble le plus fort. Tous les titres sont vécus. Ils sont joués sans forcer, comme une évidence. Prenons l'exemple de "On an Island" justement. Le bien être qui émane de cette chanson n'est pas le fruit du hasard. Il ne peut venir que d'un homme qui le vit, de nul autre. Il est serein, il joue parfaitement, c'est fluide, pas de heurt, chaque note est vécue, et le groupe est à l'unisson. Cet homme n'est plus une rock star, c'est seulement un Artiste, avec un grand A. Il est passé au dessus du rock.
Tout l'album va y passer, avec calme, volupté, sagesse même. Et pourtant, pas une seconde l'ennui nous guette, bien au contraire. "Take a Breath" va venir augmenter les décibels, mais sans que l'équilibre ne s'en trouve menacé. Rien ne peut égratigner ce concert !
Une fois achevée cette interprétation, David et ses amis nous offrent du Pink Floyd. A propos de ses amis, qui sont-ils au juste ? Comme tout ce que fait David Gilmour, c'est le top... Voyez vous-même : Phil Manzanera, l'ex Roxy Music, aux guitares électriques et acoustiques, Guy Pratt, qui accompagne David Gilmour à la basse depuis Pink Floyd sans Roger Waters, et qui accompagna Madonna en son temps, le regretté Rick Wright de Pink Floyd aux claviers, Jon Carin qui a pratiqué Roger Waters, Pink Floyd et David Gilmour aux claviers, à la guitare et à la pédale steel (et chant), Dick Parry, saxo de Pink Floyd déjà sur "Dark Side of the Moon", et Steve DiStanislao à la batterie, qui a travaillé avec Joe Walsh, David Crosby et d'autres. Si l'on ajoute le Baltic Philarmonic symphony Orchestra in Gdansk et Leszek Mozdzer au piano comme invité (il a joué sur "On an island"), avouez que l'affiche est belle ! Et ça s'entend !
Pink Floyd donc. Ça change. "Astronomy Domine" a 40 ans de plus que "On an Island", et fut composé par Syd Barett, et là aussi, ça s'entend. Dissonances, hurlements de guitare, sons saturés, mais c'est du Floyd… Belle version moderne de ce canon de la musique psyché.
Retour à du plus classique avec "High Hopes", titre pour lequel j'ai un faible. Ce morceau se prête bien aux arrangements pour orchestre (écrits par le défunt Michael Kamen), et le solo de pédale steel à la fin est à pleurer de bonheur. Suit la version intégrale de "Echoes", dans laquelle on a le plaisir d'assister à un long duo David Gilmour-Rick Wright, comme à l'époque du Floyd. Version fidèle à l'esprit de l'original, avec ses splendides parties de guitare, Gilmour oblige.
Une particularité pour ce concert, l'interprétation live de "A Great Day for Freedom", une première dans cette tournée (DG ne se souvient pas s'il l'a joué sur scène auparavant). Ce titre de circonstance méritait sa place dans le show, il l'a eut. Et, comme toujours, le spectacle fini par "Comfortably Numb" et son solo, LE solo de la fin. Et même si cette version du final n'est pas la meilleure que nous ai offerte le magicien de la guitare, elle n'en demeure pas moins émouvante. Frisson garanti, surtout si vous poussez un peu le volume…
Très beau témoignage que ce coffret audio et vidéo. Et comme toujours avec cet artiste, aucun détail ne viendra gâcher la fête. Du grand bonheur avec des musiciens au sommet de leur art.
NB : Le DVD de Bonus contient quelques titres joués à différentes occasions (dont 3 dans les studios d'Abbey Road avec un son… extraordinaire). 3 jams sont offerts en prime dont un avec DG à la batterie. Et pour les afficionados du son, sur ce même DVD bonus, une version 5.1 de l'album "On an Island" au complet. Dans la version 5 disques, outre les 2 DVD, vous trouverez 3 CD. 2 représentent la bande son du concert à Gdansk (complet, contrairement au DVD), le troisième des extraits d'autres concerts de la tournée.