Graisseux de tous poils, attachez vos ceintures, éteignez vos mégots. Nestor vous invite dans sa machine à remonter le temps. Si vous connaissez les barres chocolatées Raider, le Sinclair ZX 81 et le minitel (en gros si vous êtes vieux), il y a de fortes chances que le nom « Warning » fasse frissonner le peu de neurones que l’écoute prolongée d’Iron Maiden et de Dream Theater (il en faut) a laissé indemne. Nous sommes en 1981, sous l’ère Giscard D’Estaing, et un jeune groupe du nom de Warning frappe un grand coup avec un premier album qui démontre une maturité à laquelle on ne s’attendait pas d’une aussi jeune formation.
Dès le premier morceau, « Going To USA », la messe est dite ; la voix haut-perchée et très bien modulée de Raphael Garrido, les guitares qui soutiennent à merveille la mélodie et la rythmique, des compositions aux sonorités originales qui oscillent avec bonheur entre Hard Rock et variété… Tout y est. Tout ? Enfin presque tout. Soyons honnête, le son est un peu à la ramasse et manque de puissance. Mais, cela est peu de chose au regard de la qualité du contenu de cet album.
« Going To USA », « Cine Regard », « Satan Relaps », « Tel Que Tu l’Imaginais », « Sous Le Soleil De Mescaline », les perles sont nombreuses et ont toutes pour point commun une qualité d’écriture et d’interprétation impressionnante pour l’époque. « Going To USA » et son intro sur fond de sirènes de Steamer américain, est porté pas une mélodie voix / guitares immédiatement mémorisable. Ce morceau a tout d’un tube. « Cine Regard », plus agressif et direct, et qui permet à Raphael Garrido de faire montre de ses qualités vocales, est la version francisé de « Kings Of Creation », un titre présent sur une démo de Stratos, groupe dans lequel jouait Stéphane Bonneau (futur « Satan Jokers »), et les futurs « Warning » Didier Bernoussi, Alain Pernette, Raphaël Garrido et Henri Barbut. « Tel Que Tu l’Imaginais » est un slow à la mélodie imparable, très bien soutenu par un solo tout en émotion et par une voix émouvante et chargée de sentiments. Ce morceau, sous titré « Leidseplein », aurait pu être un hommage au « Stairway To Heaven » de Led Zeppelin à qui le groupe emprunte la formule de l’intro à la guitare acoustique, mais ce nom étrange est en fait une allusion à une place d’Amsterdam.
Suivent « Satan Relaps », avec son mariage consommé entre du Hard Rock et un refrain aux guitares Reggae, « Sous Le Soleil De Mescaline », emmené par un riff au tempo entrainant au possible et des chœurs à la gloire de Warning, « Le Casse », au chant se faisant alternativement charmeur et agressif. Seuls « New Look » et « Alice In Yonderland », un faux live d’un titre issu d’une démo de Stratos, sont d’un niveau un peu plus faible.
Le sentiment de maturité qui ressort à l’écoute de ce premier album est assez surprenant. Il est vrai que le gros du groupe se connait depuis 2 ans au moment de l’enregistrement et que Christophe Aubert, qui a officié aux cotés de Johnny Hallyday, n’est pas un novice. Mais c’est surtout la conjugaison de la qualité des musiciens et de leur talent de composition qui impressionne. Les guitares, sans sombrer dans la démonstration, sont toujours biens posées et s’intègrent à merveille dans les morceaux (le final de « Going To USA »). Le chant haut-perché de Raphaël Garrido est suffisamment varié et surtout maitrisé pour que cette particularité ne devienne irritante à la longue. Le groupe sait en outre, proposer des titres novateurs, en mixant des rythmes et des styles rarement utilisés dans la scène Hard de l’époque, ceux-ci étant mis en valeur par des textes assez énigmatiques, mais à la sonorité parfaite.
Il ne manque donc pas grand-chose à ce « Warning I » pour devenir un grand classique. Tout d’abord 2 ou 3 titres phares supplémentaires en lieu et place des dispensables « New Look » et « Alice In Yonderland », une durée un peu plus longue et surtout un son un peu plus puissant...