Durant la période allant de 1993 à 1995, Therapy a connu une période faste avec les très bons « Nurse » (1993), « Infernal Love » (1995) et l’excellent « Troublegum ». Depuis le groupe sort régulièrement des albums qui, s’ils sont plaisants à écouter, ne défraient plus la chronique. Et s’il y a une chose de certaine, c’est que ce « Crooked Timber » ne va pas changer la donne.
Si par le passé le groupe a souvent hésité quant à la direction artistique à prendre, en oscillant entre de la pop, du Punk et du Heavy, avec ce « Crooked Timber », Therapy a décidé… de ne pas prendre de décision. De fait, ils nous servent là un disque brouillon, qui part un peu dans tous les sens et qui couvre un peu tous les styles. Mais au-delà de cette absence d’homogénéité, c’est la pauvreté des compositions et le manque de passion dans l’interprétation qui posent problème. A l’exception de la section rythmique, et notamment de la batterie qui est bien en place et qui dynamise les morceaux, le reste du groupe semble en roue libre. Les titres sont alignés les uns après les autres sans particularités ni saveur. Tout au plus, dresse-t-on une oreille un peu plus attentive sur deux ou trois morceaux tels « Magic Mountain », un instrumental de 10 minutes qui passe successivement d’une ambiance Doom à la Orange Goblin à des ambiances plus atmosphériques pouvant presque faire penser à un mix de The Cure et de Sigur Ross ou le très mélodique « Exiles », ballade assez plaisante, transcendée par une section rythmique tout en finesse et en rondeur. Le son de basse y est d'ailleurs excellent.
Le reste des chansons est dans le meilleur cas très moyen (« The Head That Tried To Strangle Itself », « Clowns Galore », « Crooked Timber » et son final hypnotique), mais bien plus souvent sans aucun intérêt, quand ce n’est pas carrément désagréable (« Somnanbulist », « Bad Excuse For Daylight » et ses relents Industriels). Le disque tourne sans que presque rien n’accroche, ni émotion, ni performance technique, ni trouvaille sonore…
Therapy nous a sorti avec « Crooked Timber » ce qui est probablement son pire album. Il n’y a guère que « Semi-Detached » (1998) qui pourrait lui ravir ce titre. On ne retrouve dans ce disque aucune des qualités qui ont fait le succès du groupe : la voix d’Andy Cairns n’a plus la même rage teintée d’ironie que par le passé, et le groupe semble avoir perdu son sens de la mélodie. La formation aurait-elle fait le tour de sa créativité musicale et de sa capacité à surprendre ? Peut être pas... Il y a une lueur d’espoir dans ce quasi naufrage. Les morceaux les mieux réussis sont souvent ceux à connotation « Doom / Stoner » (« Magic Mountain », « The Head That Tried To Strangle Itself », « Enjoy The Struggle »). Bien que cela ne soit pas encore suffisant pour parler réellement d’orientation musicale, il y a là une voie que Therapy se ferait bien d’explorer.