Project Pitchfork entame avec « Dream, Tiresias ! » sa vingtième année d’existence au sein des scènes darkwave et musique électronique. Vingt années d’un incroyable rendement en termes de sorties d’albums, d’EP’s, de singles ou encore de participations à divers projet, ce dernier effort étant déjà le douzième au compteur. Derrière tout ça, deux allemands, membres fondateurs, compositeurs et interprètes : Peter Spilles et Dirk Scheuber, auxquels s’ajoute actuellement – et depuis plus d’une dizaine d’années - un troisième larron du nom de Jürgen Jansen.
Même si se retrouvent lors des tournées un guitariste et un batteur en chair et en os, c’est principalement par une orchestration électronique basée par une superposition de nappes de claviers, une beat box et des textes scandés monotonement par Spilles que se caractérise la musique des hambourgeois. Une musique forcément aseptisée, plutôt lisse par son côté électronique mais dont le rythme est souvent appuyé par la cadence soutenue de la boite à rythme. S’il s’agit que de cas exemplaires, certains titres font même figure de véritables tubes dancefloor (« Nasti habit »).
Le reste de l’heure d’écoute (sans la tracklist « bonus CD ») fait flotter une atmosphère martiale, sombre, peu encline à de grands bouleversements au fil des morceaux. D’où quelques redites, des schémas redondants, presque immuables des sonorités synthétiques des claviers et batterie, ainsi que sur le chant uniforme de Spilles, doublé sans doute pour donner un surplus de profondeur.
Etrange idée aussi de formaliser un chapitre de la mythologie grecque par des mouvements si modernes, assez peu propices au rêve finalement. Et pour cause, l’allusion à Tiresias, prophète aveugle de Thèbes, n’est qu’une ironique métaphore, permettant de mettre à l’honneur « tous les rebelles de notre société qui ne se fient pas à une vue superficielle du monde, mais qui cherchent les réponses dans une profonde réflexion et sont capables de voir la vraie vérité cachée ».
Vue de l’esprit intéressante mais pas suffisante pour faire passer la pilule d’un « Dream, Tiresias ! » qui ne va pas jusqu’au bout des choses. Pas dénué d’une certaine musicalité, il ne semble pourtant que trop sommairement façonné, se révélant plus comme une esquisse qu’une œuvre aboutie, et paraît être destiné à un public aux exigences modérées.