Depuis de nombreuses années, un phénomène s'observe dans la sphère Metal, il s'agit du rapprochement des musiques extrêmes et progressives. D'excellents groupes ont émergé dans cette optique comme Cynic ou Opeth mais il manquait un album. Un album qui ouvrirait une multitude de portes, une sorte de synthèse de ce qui s'observe actuellement pour pouvoir enfin avancer. Et à ce stade, je ne créerai plus vraiment la surprise en disant qu'avec le premier véritable album de Kalisia, « quelque chose s'est enfin vraiment passé ».
Il faut dire que le groupe a bossé. Depuis sa démo, "Skies" (remasterisée sur un deuxième CD avec l'édition digipack, ainsi que quatre reprises), qui avait fait du bruit au milieu des années 90, le groupe travaillait sur un album au concept dantesque. Une seule chanson, découpée en chapitres, qui raconte une histoire invraisemblablement complexe pendant soixante et onze minutes. Pour servir ce travail ambitieux, Kalisia n'a reculé devant rien et l'album est ainsi un véritable condensé de bonnes idées et d'innovations. Passages techniques et rapides, riffs dévastateurs, passages électro, saxophone, flute, éléments symphoniques... L'album est une synthèse d'un grand nombre d'éléments s'imbriquant à la perfection.
Le tout aurait pu être indigeste mais ce n'est pas le cas. Il serait inexact de dire que c'est cohérent, du moins au sens ou on l'entend d'habitude. Très peu de thèmes se retrouvent sur les différents morceaux et l'ensemble est très éclectique, mais le fait est qu'aucune transition ne choque. Cette cohésion s'explique par un son toujours dynamique, même dans les passages plus calmes (écoutez donc ce son de batterie, brutal et puissant). Une véritable innovation vient de l'utilisation des voix. Le chant death succède sans problème au chant féminin ou à des voix robotiques voire des choeurs grégoriens, sans avoir l'impression d'entités qui se répondent. En effet, l'une des idées de "Cybion" est que nous appartenons tous à un tout. Cette alternance de voix fusionnant les unes dans les autres l'illustre efficacement.
Lorsque les dernières notes s'achèvent, il est impossible d'être resté indifférent à ce traumatisme musical. Kalisia a parfaitement digéré deux décennies de musique, et lance dans le paysage metal un album étrange, sans concession dans le mélange des genres. En tirant le meilleurs de ces influences et en livrant un album peut-être pas parfait, mais purement original, ils ont réussi l'amalgame ultime qui permet d'être enfin optimiste sur l'avenir du métal. Tout simplement.