Achetez en 2, payez en 3 ! Super, gratuit, promo, pas cher, réduction, faites vous rembourser la différence dans 10 ans si vous n’êtes pas satisfaits aujourd’hui ! Prenez-moi, consommez-moi, aimez-moi : bienvenue dans le supermarché de la Pop ! En 1997, U2 n’est déjà plus une PME en matière musicale. Toutefois on peut toujours reconnaître aux Irlandais une belle capacité à faire évoluer leur musique pour le meilleur (souvent) et le pire (de temps en temps !). Comme aborder alors un album qui semble porter son contenu sur sa pochette ? « Pop »… U2 a toujours vendu ses albums par wagons entiers : pourquoi ce besoin de faire de la pop ?!
A y regarder de plus près, jamais le groupe ne s’est placé dans une mouvance « pop », le dernier album en date, Zooropa, étant encore une preuve flagrante. Or en matière de musique, « pop » est un terme inquiétant pour beaucoup, effrayant pour certains, qui amène à la question suivante : U2 va-t-il adapter la pop à ce qu’il est, ou s’adapter à elle ?
C’est d’abord en « Discothèque » que nous mettons les pieds. Et… mais… est-ce possible ? U2 nous fait de nouveau bouger ! Plus nous approchons des portes, plus le son se fait lourd et envoûtant. Une fois franchies, nous voici en piste sur un rock électro aux riffs imparables soutenus pas une batterie syncopée et une basse ronronnant. La soirée s’annonce bien, pourquoi ne pas rester un peu ? Les beats deviennent résolument électro sur « Do You Feel Loved » et « Mofo ». La voix de Bono parvient à apporter une touche aérienne et sensuelle aux deux titres pour un résultat toujours aussi entraînant. Une progression et un zénith se font sentir sur « Mofo », expérience dancefloor la plus poussée du groupe, qui effleure ici des rythmiques drum’n’bass avec une maîtrise impeccable.
Ah mais oooh ! Qui a éteint la lumière ? On n’envoie pas un slow si vite dans une vraie soirée ! C’était sans compter sur l’autre concept de l’album, celui qui en fait définitivement un album « pop » : l’ambiance supermarché ! Dans une grande surface c’est bien connu, il en faut pour tous les goûts ! Si les fans de boissons énergétiques ont été conquis par les 3 premiers articles, ce sont les jeunes filles en fleur mangeuses de desserts allégés qui vont se ruer sur « If God Will Send His Angels » ! Le problème de la musique à 0% est qu’on a bien la texture, mais pas le goût… C’est ce qui se passe ici, heureusement un peu moins sur « Staring At The Sun » qui a mis un peu de vrai sucre dans son aspartame ! Cha colle aux dents mais ch’est bon !
Tiens, ça bouge de nouveau au rayon électronique ! Offre deux pour le prix d’un avec le lot « Last Night On Earth » et « Gone » ! Promotion plutôt alléchante puisqu’il s’agit des derniers articles de bonne qualité en stock… Les ingrédients sont basiques, mais la recette certifiée origine contrôlée U2 ! Basiques les ingrédients car édulcorés : pour faire des lots c’est bien connu on enlève un peu de ce qui fait l’exception pour ajouter de la facilité.
Des clameurs se font entendre au bureau des réclamations. Nous nous approchons et découvrons un groupe de clients mécontents demandant un remboursement. « C’est un scandale, s’écrit l’un d’entre eux, sur l’emballage était marqué « Présence d’un chanteur sur tous les morceaux garantie », or après consommation de « Miami », « The Playboy Mansion » ou « Wake Up Dead Man », je constate qu’on m’a menti ! ». « Et c’est sans compter sur la sensation d’ennui profond sur les 3 derniers titres ! Renchérit son voisin. » Derrière son comptoir, un Brian Eno un peu gêné tente d’expliquer à la foule qu’il n’y est pour rien cette fois-ci, en distribuant des bons pour le prochain album…
Le problème, c’est que lorsqu’un client a patienté 4 ans pour se rendre dans sa boutique préférée pour cause de rénovations du dit endroit, et qu’à la fin de son shopping il se demande s’il reviendra un jour, on peut avoir des doutes sur sa présence à la prochaine réouverture. Difficile de toujours distribuer des avoirs à des consommateurs qui ont encore eu l’impression de… se faire avoir ! Pour la peine, nous allons noyer notre chagrin en « Discothèque », en espérant être déjà inconscient à la fin de la piste 7…