Et voilà. Après quatre albums extrêmement prometteurs, Judas Priest passe enfin à la vitesse supérieure grâce à cet opus. L'album en question s'appelle "Killing Machine" et il sera renommé à sa sortie aux USA pour ne pas choquer d'où le deuxième nom qui lui est souvent ajouté : "Hell Bent For Leather".
La première chose marquante vient du son qui rend enfin justice au groupe. Les riffs sont mis en avant, puissants, travaillés, inventifs. La paire Tipton/Downing ne se contente jamais d'une seule idée. Ils la complètent et la font évoluer au sein des morceaux pourtant courts, sans pour autant donner une impression de précipitation. Dans le genre, le morceau "Hell Bent For Leather" s'impose en référence : couplet - refrain - couplet - refrain - pont chanté - deux soli supersoniques et variés - à nouveau le pont - refrain en fade out, accompagné dans sa chute par un Rob Halford dans un bref état de grâce, le tout en deux minutes trente huit.
Les morceaux s'enchaînent sans temps mort et les idées défilent. Le mot d'ordre ? Aller à l'essentiel. A chaque fois le groupe passe en revue les principaux styles de hard / heavy qui sont sur le point d'éclore. "Evening Star" pour le hard FM, "Take On The World" pour le métal à hymnes, "Burning Up" pour le glam ou encore "Running Wild" très proche de Iron Maiden... Chaque titre est nécessaire et présente un intérêt. Il est même difficile de ne pas trouver belle la ballade sirupeuse "Before The Dawn".
Cerise sur ce gâteau très alléchant, tous les membres sont ici au mieux de leur forme. Tipton et Downing s'entendent comme jamais, Halford chante remarquablement bien, alternant intelligemment chant aigu et épique et celui grave et agressif. Enfin, Les Bink fait très bien son boulot, réussissant à lui tout seul à animer la fin du titre "Killing Machine" avec sobriété.
Nous sommes en 1979 et le paysage métallique bouge. En ce mois de mars, Motörhead sort "Overkill" à peu près en même moment que "Hell Bent For Leather" sort aux USA (quatre mois après sa sortie anglaise). Fin février, Scorpions avait déjà durci le ton avec "Lovedrive". Quelques moi plus tard, un certain Steve Harris rentrera en studio, bien décidé à faire parler de lui. Une vague se lève sur l'Angleterre, et grâce à cet album parfait, Judas Priest s'impose comme un précurseur légitime du mouvement à venir.