Il faut être honnête, plus personne ne croyait vraiment au retour de Queensrÿche. Après l'excellent "Promised Land" en 1994, chaque album du combo américain avait été une déception pour les fans. Même en jouant sur la corde nostalgique, le groupe n'arrivait plus à déclencher la passion de ses succès passés, et "Operation Mindcrime II" était sorti en 2006 dans une relative indifférence.
Pourtant avec "American Soldier", le groupe fait à nouveau dresser les oreilles du fan endormi qui se cache en chaque amateur de métal. La force de ce disque est d'arriver avec un concept neuf. Toutes les chansons traitent de la guerre et du vécu des soldats américains, comme le devinent déjà les plus perspicaces. Ce concept n'est pas une idée en l'air, mais découle des échanges du groupe avec leur nombreux fans militaires. Le dévoué Geoff Tate a passé les dernières années à récolter des informations auprès d'anciens soldats.
Parlons un peu de ce Geoff Tate. Le disque porte indéniablement son empreinte. Outre le fait qu'il soit le seul crédité sur tout les titres, il nous sert également des textes de qualité qui abordent intelligemment un propos délicat, surtout au U.S.A. (rappelons qu'une pochette spéciale a été faite pour ce pays, l'image d'un drapeau américain au sol étant trop sensible...). Le chant de Tate est excellent tout au long de l'album et le magnifie. Sa voix possède ce grain et cette chaleur qui fait qu'il n'a pas besoin de pousser pour donner une impression de puissance, et il nuance son chant avec une facilité déconcertante, tout en restant constamment au service de la mélodie.
Coté compositions, le schéma proposé est simple et efficace. Pas de démonstration gratuite, tout est fait pour simplifier le message et le rendre attrayant. Comme sur "Empire", les titres sont directs, et l'ambiance travaillée rappelle "Promised Land". Même si certains titres sont assez heavy ("Sliver", ses vocaux agressifs et son solo véloce) dans l'ensemble, c'est surtout le son qui donne la puissance.
En effet, la basse, très présente, forme comme une colonne vertébrale souple mais solide sur laquelle le morceau peut se construire. Les effets sonores sont parfaits, les morceaux vivent réellement. La voix de Tate se rapproche pour vous susurrer quelque chose, puis s'éloigne dans un cri, un saxophone passe parfois, un chant féminin (qui n'est autre que celui de la fille de Geoff Tate) s'invite sur le sublime "Home Again", rajoutant à la mélancolie acoustique du titre. Une multitude de petits éléments rendent ainsi l'écoute passionnante.
Le seul regret pourrait être de ne trouver aucun titre qui ne sorte réellement du lot. Les passages enthousiasmants sont disséminés sur tous les morceaux. De plus, les titres sont assez minimalistes dans la structure, et certains se ressemblent un peu. Heureusement, le niveau de l'album va crescendo et l'écoute n'est jamais pénible.
Inutile de le cacher, cet album est une très bonne surprise pour moi. L'album n'est pas révolutionnaire, mais attachant et plein de bonnes choses. Et puis cela faisait trop longtemps qu'à la question "Comment trouves-tu le dernier Queensrÿche ?" je n'avais pas eu l'occasion de répondre "Vraiment bon".