Ce disque revêt une particularité. Son auteur affiché, Andrew Gorczyca, n’est en fait que son pré-géniteur mais pas son concepteur. Vous me suivez ?...non ? (remarquez ce n’est pas la première fois !). Bon, alors je vous explique chers accros de MusicWaves. Suivez-moi par ici…
…Cet américain est en fait décédé en 2004 à l’âge de 40 ans. Grand amateur de Rock Progressif, il a consacré toute sa vie à sa passion en composant des morceaux de musique chez lui, seul. Il n’a ainsi jamais travaillé avec d’autres musiciens et n’a jamais cherché à enregistrer ses chansons dans un studio professionnel. Lorsqu’il quitta ce monde, son frère Chris, afin de lui rendre hommage et d’éviter de laisser ses travaux tomber dans l’oubli, décida de collecter ses chansons achevées, mais également ses démos et ses notes, peu nombreuses, où figuraient quelques paroles et de les réunir sur un album. C’est donc en fait presque un tribute album qui nous est proposé ici.
Pour réaliser son projet, Chris sollicita 17 musiciens dont certains sont connus pour avoir croisé la route de quelques pointures. Citons par exemple Nick D'Virgilio, Dave Meros et Ryo Okumuto de Spock’s Beard, Adrian Belew qui a joué avec Frank Zappa, David Bowie, les Talking Heads et King Crimson, Ted Leonard le chanteur d’Enchant et Mike Keneally qui officiait chez Frank Zappa et Steve Vai.
L’idée directrice de cette entreprise était de recréer, sans la trahir, la musique du disparu avec respect, sensibilité, finesse et crédibilité. Construire un album, souhaité homogène, avec une base de titres et de démos écrits sur une période de 20 ans n’était pas gagné d’avance. Quatre ans de travail et le talent des musiciens ont permis que le miracle ait lieu car c’est indéniable, nous avons ici réellement l’impression d’écouter un « vrai » album. Quand vous saurez qu’il a été enregistré dans 12 studios situés dans 6 villes des USA, vous pourrez vous faire une idée de la performance de la « collecte » et de sa cristallisation.
Pour ce qui est du genre musical développé, il navigue, bien entendu, principalement dans la sphère progressive chère à ce pauvre Andrew. Cependant, ici et là, émergent des touches Pop (disséminées) et d’AOR ("Curiosity Song (I Only Want To Know)"), qui agrémentent mélodieusement le style majeur abordé. On pense à Yes (souvent, mais surtout sur "All Fixed (Predestination)" qui aurait pu trouver sa place sur "90125"), au Rush des années 80 du fait des claviers ("From This Day Forward"), au King Crimson (des années 80 également), à Spock’s Beard ("Pleasant Under Class"), à It Bites ("The Tall Tale Heart", "Give It Time"), à Eloy, à Pendragon et à Police, rien que du beau monde donc.
Cette œuvre est donc réservée aux amateurs de Prog ne cherchant pas trop les ruptures de rythme à tout va et les constructions complexes (sinon ils seront déçus), et ne balayant pas d’un revers de main tout ce qui sonne trop AOR (sinon ils vont dénigrer). Cet opus s’adresse également aux amateurs de belles guitares, qui, quant à elles, s’envolent, électriques et échevelées ou cherchent à séduire, acoustiques et plus posées.
Sacré épitaphe donc, qui concrétise le talent d’un illustre inconnu qui aurait mérité de sortir de l’ombre avant que celle-ci ne l’engloutisse pour l’éternité. Rest in peace Andrew.