Qui n’a jamais rêvé d’envoyer un groupe de Heavy Metal dans l’espace ! Heavy, Power ou Speed d’ailleurs peu importe... Ce qui aurait compté avant tout eut été de voir le comportement d’un Maiden, Manowar, Rhapsody dans une navette ! Un peu comme Martine fait du Thrash, nous aurions eu à n’en pas douter un mélange savoureux à chroniquer ! Comment ? Nous AVONS un mélange de ce type à chroniquer ?! Embarquement immédiat alors !
La mission du jour consiste à étudier le plan de vol de The Chain Reaction, concept album galactique d’Anthropia. Et premier constat : c’est un concept intelligent ! Ils ne sont pas si rares me direz-vous, mais celui-ci est particulièrement bien écrit. L'âme #COTDM-52899 (Hugues), éprise de #7237 (Nathalie), se voit contraint à retourner une nouvelle fois sur Terre alors que le Paradis lui avait déjà maintes fois été promis. Séparée de son âme sœur, elle entame une rébellion dont les réactions en chaîne s’avèreront désastreuses…
C’est bien connu, les moments les plus délicats dans un vol sont les décollages et atterrissages. Si la mise en place du vaisseau Anthropia n’a rien d’exceptionnel en nous proposant une ouverture symphonique agréable mais convenue, l’allumage des réacteurs et la poussée ont tout à fait l’effet escompté : nous clouer au siège ! « A New Self » est un Heavy Prog imparable nous plaçant directement sur orbite. On entend déjà les quelques claviers et chœurs toujours bienvenus envahir l’espace. La voix féminine claire ou rageuse de Nathalie Olmi apporte ce qu’il faut de féérie et de colère à l’ensemble. Notons au passage qu’Hugues a fait de gros progrès au chant, parvenant à nuancer les lignes trop linéaires du précédent opus.
Il est plus que temps d’ailleurs de jeter un œil sur notre équipage ! En effet, si le concept, le son et la richesse des morceaux ne peuvent que nous faire penser à Arjen Lucassen et son projet Ayreon, Hugues a ici agrandi son cercle sans en venir à une myriade de participations. Le groupe semble s’être soudé grâce à la tournée précédente et chaque membre apporte ses compétences propres pour un rendu sublime de justesse et de respect mutuel.
Justesse, car s’il est question de progressif ici, nous n’assistons pas à une débauche de shred au feeling douteux. Chaque note est pensée pour s’inscrire dans une trame mélodique millimétrée et bouleversante. Respect mutuel également, car chaque instrument a droit à son expression personnelle, sans que les autres tentent de lui voler la vedette. Les breaks sont ainsi nombreux et menés de mains de maîtres. Pour conclure ce tour d’équipage, notons l’intervention créatrice de Kevin Codfert d'Adagio sur «Whipping Soul» pour un interlude au piano indescriptible de sensibilité.
Le voyage, malgré son plan de vol sombre, se passe donc exceptionnellement bien. Les morceaux les plus abordables « A New Self » ou « Take Me Home » ne s’avérent jamais pauvres, comme le prouve cette ligne de basse imparable dans le final du second cité. Ils créent de belles parenthèses aux côtés des interludes instrumentaux « The Night At The Opera », effort symphonique jouissif, et « Those Days Are Always Rainy » où l’on percevrait pour peu une influence made in Steve Hackett et « Horizons ». Un clin d’œil plus sensible encore est fait aux Who sur les claviers débutant le titanesque « Trinity ».
Apparaît enfin l’inconvénient d’un tel périple : il est absolument impossible à décrire ! Il vous faudra revêtir votre combinaison spatiale pour embarquer à bord et faire vous-même le voyage. Si cela peut finir de vous convaincre, sachez simplement que la conclusion de l’album vous surprendra autant qu’elle vous enchantera, que la balade « The Torn Off Wing Of The Butterfly » révolutionne à elle-seule le genre, et qu’il m’est resté comme impression après cette écoute d’avoir découvert un Liquid Tension Experiment magnifié par des paroles. Par ailleurs, si « The Altar Of Truth » et « The Tree Of Life » n’ont pas été abordés dans ces lignes, ce sont tous deux des monuments ne venant que confirmer ces dires.
Je me dois de vous quitter : le vaisseau repart à l’instant pour un nouveau voyage vers ma planète Platine. Il ne tient plus qu’à vous de lui offrir la même trajectoire en vous procurant cet album de très haute volée...