Ce cinquième album studio de Lamb Of God ( sixième pour les 4 ‘ricains si on compte leur première sortie sous le nom « Burn The Priest » ) inspire une variété de réactions pour le moins discordieuses, allant de la dithyrambe aveugle à l’exécration pure et simple. Il est intéressant de constater que par hasard cette dernière approche du groupe est tout bonnement née après le monumental succès de « Sacrament », précédent effort sorti en 2006 et qui fit quelques percées remarquées dans les charts, notamment grâce au hit « Redneck ».
Alors on pourrait ressortir le sempiternel « les goûts et les couleurs… ». Oui mais non, pas cette fois, car pour faire autant preuve d’hostilité à un album comme « Wrath », il faudrait plutôt évoquer « l’agacement et la mauvaise foi ». L’agacement car oui, on peut envisager qu’éventuellement les frasques et l’image un peu rock star stéréotypé véhiculée par la bande à Blythe, leur succès et donc leur surmédiatisation qui en découle puisse claquer à la gueule de certains. Conséquence apparente de cet agacement : la mauvaise foi. En effet il est légitime de se demander comment des mecs sensés être amateurs de métal (rappelez-vous, a la base c’est pour ça que vous êtes là non ?) peuvent ne trouver que matière à dérision et pondre des critiques aussi massacrantes pour cet album qui ne passera certainement pas les contrôles anti dopages du prochain tour de France.
Randall Blythe, frontman charismatique et beugleur aux mille coupes de cheveux, bien que restant vague (non là je ne parle pas de son brushing) annonçait il y a quelques mois une sorte de retour en force vers la brutalité inhérente aux débuts de la carrière de Lamb Of God, il est vrai quelque peu émoussée par un « Sacrament » aussi efficace qu’accessible. C’est assaillis par la crainte d’un retour aux sources boiteux similaire à celui effectué par les thrashoteurs germanique de Kreator que j’appréhendais alors la nouvelle. La première écoute de « Wrath » balaya d’un revers de main cette angoisse qui s’écrasa directement dans le mur.
Un petit malin ce Randall, car si la brutalité est effectivement poussée un cran au dessus, il aura omis de préciser que par la même occasion le groupe réalise la performance d’insuffler une bonne dose de mélodie supplémentaire à sa rage ainsi régénérée. Deuxième réjouissance, une évolution non négligeable des vocaux, bien plus variés que par le passé, à dominante bien grasse et racleuse évidemment, mais allant jusqu’à des incursions Power Metal comme sur le premier morceau « In your word ». Mais pas d’inquiétude, le bon vieux beugleur qu’est Blythe nous ressert ses gargarismes aux relents de Old Whiskey et envoit des lignes de chant ultra accrocheuses. Le titre le plus représentatif de ces deux évolutions précitées est peut-être « Grace » où Morton nous balance un solo aux relents de death melo suédois et où Blythe étale tout son spectre vocal et module ses fréquences, voix de ventre, de poitrine, de gorge, de tête, le tout avec une maîtrise et une facilité de passer de l’une à l’autre qui force le respect. Le bonhomme risque d'être claqué en fin de tournée !
Niveau brutalité, effectivement le niveau supérieur est régulièrement passé et Chris Adler se laisse même aller à quelques blasts anecdotiques (« Set To Fail », « Everything To Nothing »). Même si la comparaison systématique est quelque peu réductrice à mon goût, c’est pourtant vers un Pantera survitaminé que tendent des titres comme « Contractor » ou « Choke Sermon ». Du côté puissance sonore, c’est évidemment la patate de concours, la grosse, l’énorme, celle qu’on amène sur la table du jury à deux à l’aide d’une brouette.
Quoiqu’on puisse en dire ici ou là, Lamb Of God signe de nouveau un excellent album de gros métal qui tâche, authentique et franc du collier. Voilà qui va sans aucun doute faire mouche une fois de plus. Là où certaines critiques s’acharnent sur la sois disante simplicité des riffs, appréciez plutôt l’ensemble qui sent bon le vieux garage mal aéré aux effluves d’hydrocarbures, de gomme cramée, de poussière et de bonne bibine. Ce serait gâcher son plaisir de ne pas avouer que cet album est un pur bonheur à chaque écoute ! Alors baissez le petit doigt, cessez un temps d’invoquer Dieu Complexité, et jetez-vous une bonne rasade de Jack Daniels derrière la cravate à ma santé.