Beuglements entendus au fond d’une taverne du Texas un soir d’été : « Hey les mecs on s’écoute un album de WASP ? ». Réponse des mecs, bières et barbes fièrement tendues : « Ouaiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiis ! ». Le gros Dédé (prononcer à l’américaine « Big Deïdeï » !) se dirige vers le jukebox et pianote avec dextérité et doigts bouffis sur le clavier fluo. Il murmure délicatement dans un rot caverneux « Hey y en a un que j’connais pas dans l’tas ! ». Pas de réponse dans le fond de la salle, depuis que Big Dédé les a laissés, les mecs ont sombré dans un coma et une marre de houblon frelaté. Il décide donc de mettre en route la galette inexplorée, sûr d’avoir une bonne heure devant lui avant la 18e tournée.
Tandis qu’il s’installe dans son rocking-chair face au tourne disque poussiéreux, les premiers accords de « The Heretic (The Lost Child) » lui parviennent. « Hey mais c’est quoi cette musique de mauviette ! » s’offusque-t-il intérieurement, « où sont mes accords de guitare bien gras et la voix rocailleuse ?! Et c’est quoi ces chœurs de curé ! ». Mais déjà il sent pointer la tempête, réalisant que cette accalmie n’est qu’une montée en puissance déguisée qui a déjà fait son petit effet. Se déchaînent alors la foudre et les éclairs, une batterie au groove imparable impose sa cadence d’enfer, une déferlante de riffs vient lui marteler les tympans, la voix éraillée mais claire raisonne avec puissance : sous sa barbe, Dédé sourit. Le pont arrive et il bondit sur ses jambes, possédé devant le juke-box il se lance dans un headbang effréné à s’en faire sauter les plombages ! Quant il se rassoit enfin il réalise que 8 petites minutes se sont déjà et seulement écoulées…
« Wooh ! », constate notre homme, « Et cette basse qui claque, ces quelques trompettes, mais ça continue en plus ! Ce « The Real Me » est joliment burné dis donc ! ». « Tiens, encore des chœurs… hola c’est quoi ce riff lourd et torturé, et ces cris, ces plaintes... tiens mais c’est un clavier à la Deep Purple ça ?! Hmmm c’est lourd, c’est booon ! Hey mais c’est quoi ce break et ces soli ! Oooh ce « The Headless Children » est encore vraiment classe ! D’ailleurs « Thunderhead » n’a rien à lui envier ! »
Revenant s’asseoir, et accessoirement se rouvrir une bière, Dédé réalise que son pied continue de battre la mesure sans pouvoir s’arrêter. « Hmmm ouais mais faut dire que ces « Mean Man » et « The Neutron Bomber » sentent les vieux moules dans lesquels WASP avait créé ces deux premiers albums : y a d’la qualité là ! », c’est pas faux Dédé !
Mais notre petite valse intermédiaire s’achève déjà et il faut que tu me dises ce que tu penses de la première ballade du groupe. « Hé hé bah moi tu sais, ça sonne un peu Southern avec cette guitare, donc c’est déjà presque gagné ! Et puis la voix me fait un truc, enfin ça me touche quoi… Ah ouais et puis ça donne pas envie de pioncer non plus, y a un p’tit côté Freebird à la Lynyrd qu’est bien ficelé. » On est à nouveau d’accord ! « Bah du coup tu dois trouver que la fin d’la galette dépareille pas avec le début et qu’on s’y retrouve toujours avec ces « Maneater » et « Rebel In The F.D.G. » ». A 100% ! On révolutionne plus le genre, mais la maîtrise et la qualité sont là !
Au fond de la salle, deux épaves refont surface et demandent dans un rot si « y reste d’la bière dans ce rad’ », Dédé s’approche d’eux, leur tendant 2 bouteilles du précieux liquide en leur beuglant « Les mecs j’viens d’faire une belle découverte, j’vais relancer un truc et vous allez comprendre ! ».
Note : « The Real Me » est une reprise d'un morceau des Who écrit par Pete Townshend, extrait de l'album Quadrophenia.