S'il n’est pas fréquent que l’on m’attribue un disque de heavy-métal à chroniquer, je dois avouer que pour obtenir le privilège de faire la chronique du quatrième opus du groupe finlandais Amoral, je me la suis joué plutôt fine. Mes camarades croyaient qu’Amoral était encore un groupe de death-métal et je me suis donc bien gardé de signaler à quiconque cette grossière erreur d’étiquetage. Enfin, pas si grossière que cela. Car ceux qui connaissent Amoral savent qu'ils donnaient à l’origine dans un death métal plutôt technique et fort plaisant. Sauf, que depuis le départ de Niko Kalliojarvi et l’arrivée d'Ari Koivunen au chant, la formation a abandonné les contrées extrêmes pour arriver sur les terres du heavy-métal.
Amoral ne s'est pas totalement défait de ses origines musicales et un titre comme 'A Shade Of Gray', en dépit de ses apparences, transpire fortement le death-métal avec sa rythmique et son côté technique adéquats. D’ailleurs, c’est là une des grandes qualités des compositions du groupe : la petite touche technique qui exalte des titres déjà bien pensés. Il faut dire que la paire de guitaristes est plutôt très bonne dans son genre et que les gars font plutôt bon usage de leur manche en dosant impeccablement leurs effets.
Le heavy métal des Finlandais est dans l'ensemble multiforme, Amoral abordant en effet une grande variété de styles : 'Random Words' est un superbe instrumental acoustique introductif plutôt mélancolique, 'Perfection Design' sonne gros heavy métal et n'est pas sans rappeler un groupe comme Viron, 'Sex n’ Satan' est un morceau thrashy qu'on se ramasse comme un coup de boule, tout comme le death-métallique 'A Shade Of Gray'. 'Song For The Stubborn', avec son riff imparable et ses chœurs entêtants, fait quelque peu penser à Ratt, d'autant que sur ce titre le chant d'Ari Koivunen n'est pas très éloigné de celui de Stephen Pearcy. La fin du disque, tout comme le single 'Year Of The Suckerpunch', bien que heavy-métal, sont enveloppés d’une aura plus ou moins évidente d’un sleazy rock typique des pays outre-Baltique. Naturellement, Le groupe y va aussi de sa ballade plutôt sympathique avec 'Last October'.
Amoral est le parfait exemple de la reconversion musicale réussie. Le heavy métal des Finlandais est riche en couleurs et le titre de l'album reflète assez bien son contenu. Certes, le manque de cohérence du tout devrait en rebuter plus d'un. Ce patchwork musical pourrait être une faiblesse pour certains et s'interpréter comme le signe d'un groupe qui se cherche une identité. Pour ma part, cette variété musicale s'avère, au contraire, être une grande force. Amoral fait certainement quelque peu figure de groupe touche-à-tout, mais comme il le fait avec un talent indéniable, ce "Show Your Colors" se révèle être une versatilité musicale très réussie.