La jeune trentenaire qu’est le Hard Rock français ressort ces temps-ci son ancienne garde-robe comme si elle venait de réussir une cure d’amaigrissement et qu’elle souhaitait parader à nouveau dans ses vêtements de midinette. En effet, si vous suivez d’assez près l’actualité musicale et si vous avez la bonne idée de roder fréquemment sur nos ondes, vous n’aurez pu manquer ces derniers mois les nouvelles productions d’ADX (« Division Blindée »), de Trust (« 13 à Table ») et de Satan Jokers (« SJ 2009 »). Hé bien amis MusicWavesophiles, la cure de jouvence continue allègrement ses effets puisque voici que débarque dans nos nostalgiques escarcelles un album d’un groupe qui n’avait pas enfanté d’album studio depuis…29 ans ! Ci-devant vos mines subjuguées, voici Mesdames et Messieurs les revenants de Shakin’ Street !...
C'est ainsi qu'en cette année 2009 apparaît, comme par enchantement, le troisième album du groupe affublé d’un nom un tantinet étrange : « 21st Century Love Channel » (la Chaîne d’Amour du 21ème Siècle). Question musiciens, on ne prend pas tout à fait les mêmes et on recommence. En effet, exit Eric Levy (le guitariste par qui le split est survenu – il était opposé à un 3ème album prévu en français) et Mike Winter le bassiste qui ont été remplacés respectivement par Philippe Kalfon et Fred Guillemet et addition d’un clavier en la personne de Phil Bonanno. Pour le reste de la troupe, Fabienne, Ross The Boss (Manowar) et Jean Lou Kalinowsky (batterie) sont toujours de la partie. Quant à Nono (hé oui le Nono de Trust !), il vient faire un petit tour sur l’ouverture de l’album.
Celui-ci débute avec une Human Beat Box par le sombre et mélodieux « Six Feet Under » (né de la phobie de Fabienne d’être enterrée vivante). Ce titre est lent, moderne, entêtant, limite progressif, et les guitares bien aiguisées règnent en maître, notamment sur les énormes soli de Nono. « Tell Me The Truth » qui sonne très "Crosstown Traffic", et nous fait penser à Jimmy Hendrix, a malheureusement un côté un peu répétitif, souci compensé par un solo gigantesque. L’emballant « Viking Rock », nous permet de retrouver l’esprit des origines en nous replongeant 30 ans en arrière, et évoque fortement Girlschool. « Lonely King » et son atmosphère arabisante renvoie à Led Zep, comme la voix de Fabienne qui prend des intonations de Plant. Là-aussi, les cassures de rythme surprennent agréablement.
Avec « Catch It » nous retrouvons le côté "jumpy’’ de Shakin’ Street, particulièrement sur le refrain scandé. Nous ne sommes pas forcément ici en présence d’un gros morceau mais le solo mérite une fois de plus une écoute attentive. « Sex Shop », une émouvante ballade qui nous ramène à Guns'n'Roses, dont l’ambiance country sur les couplets fait également ressurgir l’image de Lou Reed, s’achève dans un solo dantesque. « Dracula » moins inspiré, est sauvé par les soli. « Stick to Me » rappelle la jeunesse du groupe, un peu les Stones, particulièrement sur la fin et ses ‘’Ouh Ouh’’ (on pense à « Sympathy For The Devil »). Mais là-aussi, l'ensemble est un brin répétitif malgré, une fois de plus, des guitares royales. Le très Rock US « Streets Of San Francisco » aurait pu sortir d’un album de Bon Jovi époque « Bounce ». Son refrain très porteur en fait un des meilleurs titres de l’opus. Nous restons aux States pour clore l’album avec « Goodbye Pain » qui sonne typiquement ricain et s’achève en apothéose guitaristique, définitivement la marque de fabrique de ce disque vraiment sympathique.
Voilà donc un retour réussi, plein de nostalgie mais également tourné vers l’avenir. Un disque à la fois traditionnel (les titres avec Ross The Boss) et progressiste. Un groupe qui ne tourne pas le dos à ses influences mais qui tente également de trouver une identité pour l’avenir. Un opus de transition certes et manquant d’homogénéité, mais un essai qui appelle des successeurs. Gageons qu’ils ne tarderont pas autant que ce troisième album à venir titiller nos tympans gourmands car là, nous risquerions de perdre patience. D’ici-là, Shakin’ Rock’n’ Roll !