Malgré des qualités incontestables, « Lady Luck » souffrait d’une certaine précipitation visant probablement à tourner la page Green Dollar Colour au plus vite. Ceci n’a pas empêché Koritni de se positionner comme un des plus sûrs espoirs de la nouvelle génération du pub-rock australien avec leurs compatriotes d’Airbourne ou, à un degré moindre, de Maeder et de Snake.
Avec « Game Of Fools », Koritni frappe un grand coup. Tout d’abord, le combo a su s’entourer. La pochette est signée Mark Wilkinson (Marillion, Fish, Judas Priest, Iron Maiden, etc…) et le mixage a été confié à Monsieur Mike Fraser (AC/DC, Aerosmith, Metallica, etc…). Le premier nous offre un visuel dont il a le secret, alors que le second dote cet album d’une production claire et puissante. Mais tous ces à-côté ne serviraient à rien si les compos n’étaient pas à la hauteur. Or, là-aussi, le groupe réussit à nous bluffer avec une succession de 13 titres à la fois efficaces et variés, et toujours dotés de mélodies inspirées et de refrains imparables. De plus, Koritni semble avoir réussit sa mutation, passant du stade de projet de Lex Koritni à celui de véritable groupe. D’ailleurs, le reste du groupe, et Eddy Santacreu en particulier, s’est beaucoup plus impliqué dans le processus de composition.
Le résultat est époustouflant, et si « Lady Luck » souffrait d’un côté un peu trop monocorde, « Game Of Fools » offre une grande variété passant de titres directs et efficaces (« 155 ») à d’autres plus lents et plus lourds (« You Vs Me ») presque inquiétants. D’autre part, si l’influence d’AC/DC ne peut pas être niée sur des morceaux tels que le boogie-hard-rock de « Deranged » ou le titre éponyme dont l’intro est plus qu’un hommage appuyé à celle de « For Those About To Rock », celle-ci est parfaitement intégrée à un ensemble à l’identité bien affirmée. Les noms d’Aerosmith (« Stab In The Back »), Cold Chisel (« Keep Me Breathing »), voir de The Angels et Bon Jovi (« By My Side ») pourront toujours venir à l’esprit, mais il s’agira plus de repères que de copiage éhonté. En effet, Koritni dégage une énergie hors du commun et certains titres sont faussement simples. Que dire du diptyque « Tornado Dreaming » dont la première partie nous promène sur un mid-tempo mélodique avant de se déchaîner sur une deuxième partie dont l’accélération semble ne pas devoir s’arrêter. Quant à « The Devil Daughter », il débute sur quelques accords acoustiques sur lesquels Lex balance quelques arpèges de façon magistrales, avant de partir sur un Hard-Rock mélodique doté de variations de tempo et de chœurs parfaitement maîtrisés.
Pour couronner le tout, l’interprétation est remarquable. Lex nous régale de sa voix éraillée et haut perchée, sorte de mariage improbable entre Steven Tyler et Jimmy Barnes. Le duo Cuerden – Santacreu défouraille à grand coup de riffs et de soli variés, toujours justes et efficaces. Enfin, la paire rythmique sait moduler son interprétation, pouvant se transformer en un véritable rouleau compresseur (« V8 Fantasy »), aussi bien qu’en un support fin et délicat (« Keep Me Breathing »).
Vous l’aurez compris, Koritni quitte la cour des grands espoirs et rentre dans celle des confirmations avec ce « Game Of Fools », qui, s’il ne révolutionne pas le genre, n’en est pas moins parfaitement produit et exécuté, et impose une nouvelle génération qui renouvelle le Hard-Rock en en respectant les racines tout en l’installant dans le présent. Voici donc une belle réussite qu’il va être difficile de surpasser cette année, voire les suivantes.