Composé en 1977 comme la démo d'un jeune groupe brésilien formé autour du guitariste Mario Neto, "Depois Do Fim" ne sera enregistré qu'en 1982 pour enfin voir le jour en 1983 et se vendre tout de même à 10 000 exemplaires. Ça ne rigole plus, même pour du Prog... Sauvé de l'oubli par un cercle restreint de passionnés, ce disque est pourtant particulièrement abouti.
La musique, qui allie un rock progressif symphonique à tendance italien avec des nuances de jazz et de légères touches hispanisantes ne dément pas certaines influences classiques ou folk. Il en résulte des compositions particulièrement construites, où les progressions et changements de rythme et de style privilégient la mélodie et l'émotion. Cependant, si la structure de chaque morceau est le fruit d'un enchainement logique, l'ensemble de l'album manque parfois de cohérence. Les arrangements pourtant extrêmement travaillés sont malheureusement desservis par une production plutôt désuète, d'autant plus que certains sons de clavier ont relativement mal supporté le passage du temps.
Pourtant le chef d'œuvre est bien là, l'auditeur le comprendra vite. Le premier titre, "UFO", est une entrée en matière de choix. Cet instrumental est varié, recherché, délicat et accrocheur. "Smog Alado", dont la flute nerveuse et les lignes rythmées de basse rappellent Jethro Tull dévoile le chant nuancé de Jane Duboc qui colle parfaitement au style de l'album. Il est question d'un monde post-apocalyptique (En portugais, "depois do fim" signifie "après la fin") et la gravité des thèmes abordés se fait sentir, surtout au niveau de l'atmosphère. Après un début électrique, "Miragem" évolue en une sublime phase de flute typé Bach gorgée d'émotion suivi d'un solo de guitare particulièrement mélodique. Décidément, Mario Neto est un virtuose dont le jeu de guitare parfois teinté Steve Howe oscille entre rock, classique et flamenco.
"Pássaro De Luz" et "Caño", plus classiques, se démarquent toutefois par leurs mélodies complexes ou par l'énergie du duo batterie-basse. Voici venu le tour du morceau phare de l'album, le point culminant de la (courte) carrière du groupe. "Último Entardecer", portée par une guitare expressive et des claviers mélancoliques, revêt un aspect épique. Malgré une légère perte de vitesse vers le milieu, ce titre est un monument de finesse et de feeling. "Controvérsia", un instrumental proche de la fusion grâce à une batterie et des synthés jazzy sers de transition avant le titre éponyme. Symphonique comme "Último Entardecer" même si moins aboutie, "Depois Do Fim" laisse plus de volume sonore aux instruments au dépend de la voix, et ceux-ci en profitent pour conclure l'album sur un admirable solo de flute relayé par une guitare discrète et subtile.
Vous l'aurez compris, cet album est une véritable pièce majeure de la musique progressive qui saura vous séduire par sa finesse, sa singularité, sa créativité mais surtout par l'émotion qu'elle engendre.