Bienvenue à notre petite leçon de géographie… Aujourd’hui : l’Australie ! Grand Atlantic nous vient en effet du merveilleux pays des Kangourous, du surf et des corps huilés sortant d’une mer déchaînée les cheveux au vent… Bref, un bien bel endroit d’après la brochure touristique ! Or vous aurez beau retourner les cartes dans tous les sens, jamais au grand jamais vous ne pourrez établir de lien direct entre l’Australie et l’Atlantique : oui chers lecteurs, si Grand Atlantic est doué ce n’est pas en géographie, mais bien en musique, la preuve est faite !
C’est de façon audacieuse que s’ouvre l’œuvre, osant un prélude tout en douceur, une ballade agréable prouvant déjà les belles qualités mélodiques du quartet. Elle acquiert toute sa dimension grâce aux arrangements disséminés tout au long du titre, des interventions légères aux claviers jusqu’aux cordes et cuivres utilisés avec sobriété. C’est d’ailleurs la maîtrise parfaite de ces arrangements sur l’ensemble de l’album qui s’avère être la signature du groupe, une paraphe personnalisée, intelligente et témoignant d’un grand talent.
Nous ayant calmement amené à sa rencontre, Grand Atlantic se montre alors plus énergique sur les « Coolite » et « Smoke And Mirrors ». Véritables hits en puissance s’inspirant tour à tour et respectivement d’illustres aînés tels que les Beatles ou U2, l’efficacité est à nouveau au rendez-vous grâce à une alternance de couplets dominés par le chant et de refrains aux riffs affutés, ou à l’apport d’un break instrumental qui n’est pas sans rappeler le « Vertigo » des Irlandais.
La machine est alors lancée et les compositions de qualité s’enchaînent, ralentissant le rythme le temps d’un « Chaos Theory » reposant sur une basse grésillant légèrement du plus bel effet, invoquant à nouveau quelques cordes au cours d’un « Wondeful Tragedy ». Toutefois, on voit surgir sur les néanmoins agréables « Until It’s Gone » puis « Slappin’ On The Cuffs » le bémol que l’on pourrait adresser à l’œuvre dans sa globalité : le manque de rythme. Car si le but des deux titres précités n’est clairement pas de se montrer agressif, c’est même une certaine mollesse qui surgit quand se multiplient les « Tulululu » et autres « Ouhouhouh » sur fond de batterie ralentie.
Toute la Face B avance ainsi d’un pas lent et mesuré, mêlant qualité et gentillesse un peu trop exacerbée. « Nice Guys » nous laissait pourtant espérer à nouveau un souffle un peu plus rock, mais le chanteur se refusant à sortir de sa douce léthargie, le titre finit par marquer encore le pas. Le plus grand intérêt vient donc bien des arrangements signalés précédemment qui continuent à colorer généreusement les titres par leurs interventions : celles des cuivres pour « Burning Brighter », des cordes pour « Take You For Granted » ou des touches sautillantes rappelant les Beach Boys sur « Moth And Rust ». « Missile Crisis », plus rock et dynamique, et « Peace Be With You », résolument planante et apaisante, viennent clôturer ce bel exercice de song-writing typiquement britannique, maîtrisé et finement ciselé.
Grand Atlantic est donc bel et bien meilleur musicien que géographe, quoique la nonchalance qui l’a peut-être amené à confondre ses océans se retrouve par intervalle sur l’album. Un rythme que vous trouverez tour à tour doux ou crispant selon votre humeur et votre sensibilité, mais un album dont on ne peut objectivement que reconnaître les indéniables qualités.