1982, Dave Mustaine, jeune homme roux fougueux virtuose de la six-cordes, intègre un petit groupe de Thrash américain : Metallica. 1983, le même homme se fait expulser sans ménagements du groupe par James Hetfield, et ce à la veille de la sortie de leur premier album : "Kill’Em All". Les raisons invoquées sont alors des tensions entre les deux hommes dues à l’alcool et la drogue, un motif qu’on aura bien du mal à remettre en cause au regard du lien entre Mustaine et ces substances dans les (nombreuses) années qui suivirent.
2 mois seulement après ces évènements, Dave, animé par un furieux désir de revanche, forme son propre groupe : Megadeth. Recrutant ses premiers acolytes, que furent : David Ellefson à la basse, Greg Handevidt à la guitare et Dijon Carruthers derrière les fûts, il se retrouve confronté à la problématique du recrutement d’un chanteur. Après 6 mois de recherches infructueuses il décide d’endosser ce rôle, pour ne plus jamais l’abandonner. Connaissant déjà ses premiers problèmes de line-up, la troupe vit défiler dans ses rangs en moins d’un an Lee Rausch, et Kerry King (futur Slayer), avant de se fixer autour de Mustain, Ellefson, Chris Poland et Gar Samuelson.
Ces péripéties pourraient paraître anecdotiques, mais elles témoignent de l’ébullition constante animant le groupe, et surtout de la personnalité torturée de Mustaine, qui fera tout pour contrôler ce qu’il veut être SON groupe, ce qui aura un impact immense (total ?) sur la musique de Megadeth. Cet état de fait peut d’ailleurs être observé dès Mai 1985 avec la sortie de ce premier volume. "Killing Is My Business… And Business Is Good" est violent, foudroyant, rageur et torturé, en un mot : Thrash !
L’impression qui se dégage est celle d’un chaos à tous les niveaux. Au niveau de la production d’abord, si l’on peut encore oser parler de production ! Là encore, l’histoire nous apprend que le budget dédié à cet aspect (négligeable bien sûr) aurait été bu ou passé en intraveineuse, et là encore on est tenté de croire à cette version : le son est brouillon, déséquilibré, tout juste digne d’une démo. Heureusement, une réédition datant de 2002 permet de rendre justice à certains titres alors inaudibles.
Chaos au niveau des compositions ensuite, car Dave, animé par une rage aveugle et doté d’un talent immense, enchaîne riffs et soli d’une technicité et rapidité affolantes, en oubliant malheureusement de cocher la case « cohérence ». Si personnellement j’entrevois ici une puissance et une inspiration exceptionnelles, bon nombre d’entre vous pourraient être rebutés de prime abord. On débarque donc dès l’ouverture des hostilités dans un « Last Rites / Loved To Death » très énervé, tout en ruptures, intégrant même dans son introduction un motif de J-S. Bach au piano avant de déchaîner foudres et éclairs, breaks et contres-temps.
Le titre éponyme s’avère à nouveau sans concession, même s’il offre en filigrane l’aspect groovy qui viendra faire le liant dans les albums suivants, une caractéristique se retrouvant sur les deux autres très bons titres de la galette que sont « Chosen Ones » et « Looking Down To The Cross ». Est-ce à dire que tout le reste ne mérite pas le coup d’oreille ? Que nenni ! « The Skull Beneath The Skin » repose sur un riff très solide et une basse folle, « Rattlehead » en fait de même, et « Mechanix » n’est autre qu’une version sur-vitaminée du « The Four Horsemen » de Metallica, dont Mustaine n’aura de cesse de revendiquer la paternité. Le dernier titre « These Boots » est en fait une reprise déjantée du « These Boots Are Made For Walking » de Nancy Sinatra, morceau témoignant du bel humour de notre homme, et qui ne sera pas le dernier du genre.
Avec ce premier disque, Dave joue indéniablement plus vite, plus technique, plus rageur que ses frères ennemis, mais il ne joue pas mieux. L’énergie est punk, la vitesse est speed, les constructions sont thrash et le résultat est tout à fait honorable, mais bien loin encore de ce que Metallica ou Slayer avaient pu proposer avec leurs deux premiers albums respectifs. Tout était là, jusqu’à la voix de canard sous acide, ne restait plus qu’à faire le tri !
Remarque : La note a été établie selon une moyenne entre production originale et remasterisée. Original : 5/10, Remaster : 7/10