Après 6 années d'existence, Tale of Diffusion publie son premier album, relatant au travers d'une voyage musical la plupart du temps instrumental (hormis les 90 secondes New Life), une journée imaginaire d'un oiseau tout aussi imaginaire, dont le nom est Mandorius. Avant d'insérer le CD dans la platine, force est de souligner la qualité de réalisation du livret, superbement illustré par le guitariste du groupe, dont le style naïf colle à merveille avec le sujet évoqué par les 7 compositions.
Maintenant, si je vous dis que Tale of Diffusion est originaire de Pologne, immédiatement fusera dans votre esprit une comète tirant derrière elle l'étiquette néo-progressif (c'est tellement pavlovien de nos jours …). Eh bien non, pour une fois, un groupe issu de cette ex-contrée de feu le bloc de l'Est s'aventure dans des sentiers beaucoup moins balisés que les mélodies lumineuses soutenues par des guitares pleines de reverb' et des synthés synthétiques en diable (attention, je n'ai pas dit que je n'aimais pas cela !).
Ainsi, la tonalité générale de Sound of Magic va orienter rapidement le propos vers Vulgar Unicorn, le premier groupe de Bruce Soord, désormais reconverti dans la pop progressive de très haute tenue avec Pineapple Thief, mais qui à l'époque proposait un progressif souvent déjanté, s'affranchissant de nombreuses barrières. Et la trompette très présente sur ce titre, ainsi que dans d'autres coins de Mandorius rappellera inévitablement le Under the Umbrellas de V.U. Oh certes, la partie centrale de ce premier titre évoque également DSound ou encore Violet District, mais l'unité est rapidement brisée par un solo de guitare plutôt floydien à tendance psychédélique, soutenu par une section rythmique très inspirée, et parfaitement mise en avant par la production.
Beaucoup de variété donc dès l'entame, et la tendance à la déjante se poursuit avec Acting Like a Death, tandis que City of Swallowed Bells nous rejoue un Pink Floyd des années septantes, mâtiné d'un peu d'Ozric Tentacles, les passages mélodiques certes un tantinet répétitif alternant avec les séquences planantes. Les titres suivants, et notamment le long plat de résistance proposé par Melody Man vont reprendre les ingrédients précédemment cités, en les agglomérant dans tous les sens, alternant avec bonheur des passages bien balisés, avec d'autres quelque peu déstabilisants pour les oreilles moins averties.
Si le propos purement instrumental est parfaitement assumé par le groupe, il n'en reste pas moins quelques longueurs ou séquences un peu trop répétitives qui viennent de temps en temps participer à un certain décrochage de l'attention. De même, certaines sonorités de guitare, un peu trop grunge à mon goût (et notamment dans le final de l'album), auraient peut-être mérité un meilleur sort. Néanmoins, l'imagination de la section rythmique mérite à elle seule un rapide retour des sens à la concentration, tandis que les interventions lumineuses de trompette viennent rafraîchir un peu plus une musique plutôt imaginative. Album à découvrir donc pour ceux qui apprécient de sortir un petit peu des sentiers (re)battus.