Bukowski est un groupe francilien formé par des ex membres de Wunjo et Kwamis. Si cette nouvelle formation n’est pas encore très connue, elle dispose tout de même d’une redoutable réputation scénique car les premières parties assurées avec entre autre Mass Hystéria ou Eths lui ont permis de bien rôder les compositions qui figurent sur leur premier album, « Amazing Grace ».
Sous ce titre un peu présomptueux pour présenter son originel opus, Bukowski s’affirme complètement en prenant un virage pas trop serré vers un rock sévèrement burné où le triptyque faisant du genre choisi une véritable profession de foi est particulièrement bien mise en valeur. En effet, les exercices vocaux à tendance éraillés pratiqués par Matt se fondent idéalement aux riffs stroboscopiques qu’il applique avec force et persuasion. Du côté des bûcherons assurant à la section rythmique, la paire basse/batterie ne se laisse jamais dépasser par les événements et apporte un soutien sans faille aux élucubrations du guitariste/chanteur.
Bukowski maîtrise, mais surtout excelle dans ce style qui finalement n’est pas si aisé à formellement catégoriser. Surtout que le power trio dispose de beaucoup d’expérience. Ceci lui permettant de se jouer d’influences de groupes tels que Queens Of The Stone Age, Alice In Chains, Kyuss ou encore Monster Magnet. Car au bout du compte, ce rock manié puissamment par Bukowski lorgne tout de même avantageusement vers le stoner. Cette couleur si particulière s’imprègne sur la totalité des titres composant « Amazing Grace ».
A ce titre, la mise en route dépote du feu de Dieu sous le rouleau compresseur qu’est « Bro, You save Me ». Mise en place impeccable, Bukowski montre de quel bois il se chauffe. La machine, plutôt bien huilée, reste parfaitement sur les rails sous les coups de butoir de « Shaggy Dog Story » dont le refrain hurlé s’acoquine sans problème au hardcore. Tandis que « Long Cold Winter » se la joue plus lourdingue avec son break dissonant en fin de parcours, « My Name Is Kosanowski » renoue avec un stoner plus traditionnel, celui qui appâterait Dave Windorf au point de lui faire exécuter une danse de saint Guy sous son perron illuminé.
Mais Bukowski sait aussi se la jouer calme et tempéré avec les deux titres entièrement acoustiques que sont « Fishing Day », sur lequel la tessiture de Matt ressemble à s’y méprendre à celle du regretté Layne Staley et également le titre éponyme qui tire nettement plus vers le country. Seulement, entre les deux, le trio bastonne sévère et sa science du refrain qui emprisonne directement les neurones ne fait que se confirmer. Du furieux « Misanthropia », en passant par le rythmé et assez déjanté « The Grand Opening », Bukowski ne baisse pas la garde et continue sa démonstration de force au point de rallier totalement l’auditeur à sa cause.
« Amazing Grace » n’est peut être pas un titre aussi présomptueux qu’il n’y paraît. Son contenu, alliant puissance et mélodie, fait de Bukowski un orfèvre en la matière. Pourtant, sans avoir la prétention de complètement révolutionner le petit monde du stoner / rock énergique, le trio prend un envol illico vers la cour des grands. « Amazing Grace » se résume donc à un album réussi, qui laisse présager un avenir radieux et serein à Bukowski. Décidément, le rock français sait se montrer une fois de plus à la hauteur des espérances que l’on peut placer en lui.