Originaire du Colorado aux Etats-Unis, Cobalt est un groupe de Black Metal atypique. Formé en 2000 sous le nom de Grimness Enshroud, le projet fut à la base celui d’un seul homme, Phil McSorley. Rapidement rejoint par Erik Wunder à la batterie, le projet solo devient alors groupe et adopte le nom définitif de Cobalt. Pères de deux premiers albums « War Metal » et « Eater Of Birds », le style assez indéfinissable qu’y développent les deux hommes est difficilement étiqueté. Mais les essais fleurissent, jusqu’au farfelu et imaginatif « progressive tribal war metal ». Nous nous contenterons malgré l’immense kaléidoscope d’influences qui constituent « Gin » de parler en toute simplicité de « Post Black Metal ».
Hybride, cet album l’est assurément, et c’est sans doute le meilleur terme pour le définir. Mais là où beaucoup se sont cassés les dents et la mâchoire inférieure sur de précédentes tentatives, Cobalt réussit l’osmose absolue. Sans aucun doute bercés au Neurosis, c’est aussi Tool qu’il faut sans possible erreur citer en influence majeure. Mais ne réduisons pas l’œuvre à ces deux seules références. « Gin » est un formidable melting pot où se côtoient Rock, Thrash, Death, Black, Heavy, Punk, le tout dans diverses variantes intrinsèques et dans un équilibre déconcertant, jusqu’alors insoupçonnable. Difficile d'accès, il faudra de nombreuses écoutes avant que l'album ne délivre toutes ses subtilités.
Ainsi, le chant écorché, entre postcore et black metal, va-t-il divaguer entre des blasts saccadés de rythmiques tribales sur ce premier morceau enlevé à la violence jubilatoire qu’est « Gin ». « Arsonry », après une première partie sauvage subitement éteinte, se muera ensuite lentement en montée en puissance sous le spectre dominateur de « Through Silver In Blood » d’un Neurosis caché dans chaque recoin sombre. Aux longues interludes hypnotiques six cordistes comme « Throat », succèdent un « Pregnant Insect » mi-punk mi-tribal amérindien, un instrumental « A Clean, Well Lit Place » Mastodon-iesque légèrement samplé… Un peu partout les rythmiques tribales s’allient à de prodigieuses montées d’adrénaline frénétiques. L’étouffante décadence s’oxygène alternativement au cœur de compositions fiévreuses et perturbées, à la tension palpable, fumante, souvent contenue mais toujours au bord de la rupture.
Voilà un groupe méconnu qui mériterait plus d’attention. « Gin » est une réussite où bouillonnent fureur, malaise, vertige, mais aussi passion et enivrement. La scène black américaine, avec des groupes de la trempe de Cobalt et autre Nachtmystium pour ne citer qu’eux, est devenue un vivier innovateur qui est un grand bol d’air frais pour le style. A découvrir.