Pourquoi, me demandais-je à brûle-pourpoint lors de l’écoute d’Ouroboros, dernière parution en date du groupe hispano-colombien Kotebel, pourquoi donc les productions instrumentales sont elles moins accessibles que les créations vocales ? Après écoute et réflexion, j’en suis arrivé à la conlcusion suivante que c’est très probablement parce que les “orchestraux” traitent moins la musique selon le classique système couplet-refrain-pont instrumental, méthode plus propice à la mémorisation rapide des morceaux. En ce sens, Ouroboros est un excellent exemple de ce que peut donner une création musicale plus débridée que le schéma courant, s’appuyant largement sur des influences jazz ou classiques.
Soit donc un quintette sans chanteur, mais avec deux claviers, construisant une musique lorgnant vers le jazz, comme en témoignent le passage en trio piano-batterie-basse du bonus (live) Mysticae Visiones ou les accents quasi-Emersoniens qui émergent dans le jeu de piano; un groupe qui joue une musique en perpétuelle tension, sans beaucoup de temps de repos (ce qui est parfois envahissant, cf. Satyrs), mais avec une technique irréprochable; un ensemble qui navigue entre un Deluge Grander dopé et un Anglagard plus dynamique, mais dans lequel on pourrait trouver des touches de King Crimson ou de the Tangent.
L’écoute laisse une impression de grande densité tant les thèmes sont soumis à variations, et la rythmique est mise en avant (peut-être un peu trop du coté de la batterie). La musique de Kotebel ne se laisse dons pas facilement domestiquer, et c’est quand le groupe s’aventure du côté du prog symhonique qu’il prend tout son envol : en laissant s’épanouir les thèmes dans Ouroboros (le morceau) ou Simurgh, le groupe nous offre de grands instants de très intéressante écoute : une musique intelligente et intelligible ... A l’opposé, le combo peut parfois s’enfermer dans des morceaux plus cérébraux, s’essayant aux dissonnances tout en gardant une tension interne, le tout pouvant passer pour une forme larvée d’agression auditive (Legal Identity).
Ouroboros est donc un disque exigeant mais d’une grande qualité, qui nécessite une certaine immersion pour en retirer toute l’essence. Le genre de disque qui vous donne envie de le réécouter pour vérifier si on a bien tout compris !