On le croyait invincible, immortel, capable de survivre à toutes les époques, tous les line-up, mais pourtant non : David «Junior » Ellefson aura fini par succomber à la tyrannie de son ami Dave Mustaine. Après 20 ans d’existence, il ne reste plus que lui, inébranlable, imperturbable, toujours en proie à quelques problèmes récurrents avec d’impies substances, mais toujours aussi génial et inspiré. Ironie du sort, ce "System Has Failed" voit revenir l’ancien compagnon d’armes du glorieux "Peace Sells" : Chris Poland. Qu’on ne se leurre pas, tout a été écrit, composé, pensé, exécuté, par le seul blond vénitien, et plus que jamais Megadeth est Megadave !
Seulement voila, Mustaine a encore une bonne dose de riffs groovy, de mélodies imparables et de soli véloces sous le manche. En est pour preuve le titre d’ouverture, le tonitruant « Blackmail The Universe » qui a vite fait de se muer en titre Heavy-Thrash comme savait les composer Dave au temps d’un "Countdown To Extinction". « Die Dead Enough » rappelle d’ailleurs sur ces premières mesures et ces quelques cordes un « Symphony Of Destruction », avant de nous surprendre en nous assénant un refrain mélodique ravivant la flamme "Cryptic Writings". Crucifié par une nouvelle rafale de soli, on se surprend à goûter aux joies de la dictature Mustainienne.
Malheureusement, à vouloir tout contrôler et nous jouer la carte de la machine à remonter le temps, notre omnipotent maestro nous gratifie d’un auto-plagiat de première catégorie : le très bon « Kick The Chair » l’aurait été bien plus encore s’il n’avait pas copié-collé à outrance l’historique « Take No Prisoners ». Mais on excusera volontiers ce clin d’œil trop appuyé à l’écoute de la suite. En effet, il faudrait vraiment être un fan de la vieille école, légèrement buté et intransigeant, pour ne pas succomber aux hits en puissance que sont « The Scorpion » et son groove terrible, ou « Back In The Day » et son break laissant éclater chœurs et riffs jouissifs. On aura d’ailleurs bien fait attention à ne pas oublier en chemin le plus mélodique « Tears In A Vial », ou l’immense « Something That I’m Not » capable de faire headbanger une poutre ! Accordons encore un peu de crédit à « Truth Be Told » qui ne révolutionne rien mais balance encore gentiment.
Et après me direz-vous ? Après tout s’écroule. Car c’est peut-être avant tout sur l’après que l’on juge un album, la difficulté ne venant pas de la création d’un ou deux titres géniaux, mais d’une douzaine. Or avec « Of Mice And Men », « Shadow Of Deth » et « My Kingdom », Dave passe pour la première fois complètement à côté de la platine. « Of Mice And Men » est geignard, plombé par un refrain qui se veut mélodique mais s’avère pénible, mais le pire est à venir avec un « Shadow Of Deth » qui fait une incursion du côté du True-Metal ! On a donc droit à un triste Meganowar bien lourd et frisant le ridicule absolu pendant 2 trop longues minutes. « My Kingdom » vient achever avec sa rythmique pachydermique ceux qui avaient encore en tête les riffs de « Back In The Day ».
La question est à nouveau posée : Dave Mustaine peut-il à lui seul faire vivre Megadeth ? On serait tenté de le penser pendant une bonne moitié d’album, mais il faut croire que sur la durée le génie de notre homme n’est plus aussi vivace qu’à ses débuts. A l’inverse de ses œuvres précédentes, plus denses, plus homogènes, ce "The System Has Failed" semble évoluer une catégorie en-dessous. Malgré cette baisse de régime indéniable, quelques compositions valent encore le détour : trop peu diront certains, c’est déjà bien affirmeront les autres. Et c’est vrai, que c’est déjà bien ! Non ?