Allongez-vous, fermez les yeux, et écoutez. Contrôlez le rythme de votre respiration, et laissez vous porter, bercer par ces sonorités d’un genre nouveau : le rock progressif ambiant atmosphérique électronique. Ne riez pas, je me suis déjà efforcé de faire l’impasse sur d’autres adjectifs tels qu’onirique, synthétique et fantasmagorique ! Mais ne nous emballons pas, tous ces qualificatifs sont à prendre avec des pincettes.
Votre hôte pour ce voyage sera Ethan Matthews, claviériste multitâche déjà connu pour sa participation à un groupe de métal prog, Greyhaven, arrêté depuis le début de l’aventure Echo Us. L’homme a d’ailleurs radicalement changé son fusil d’épaule, ne gardant de ses premières heures que la caractéristique « prog ». Pour le reste, là où Greyhaven était sombre et métallique, Echo Us se veut lumineux et éthéré. Malheureusement vouloir n’est pas toujours pouvoir.
S’il fallait commencer par les qualités de l’œuvre, sans doute aurions-nous à cœur de souligner la belle palette d’instruments, d’influences, de samples et d’effets, déployée par Ethan Matthews. A aucun moment il ne tombe ainsi dans le minimalisme embourgeoisé du style auquel il s’adonne. C’est pourtant là une dérive très courante dans le style atmosphérique, qui pousse ses auteurs à disséminer les notes avec une telle réserve, que l’on en vient à croire qu’ils n’ont que quatre touches sur leur clavier. Point de tout cela ici, la multitude d’arrangements est généreuse, parfois trop, mais nous y reviendrons.
Autre point fort : la production. Claire, limpide, cristalline sans être aseptisée, elle met en valeur absolument chaque élément mélodique. Elle paraîtra sans doute artificielle à certains, mais puisque ce résultat est à coup sûr le fruit d’une volonté de l’auteur et d’un travail important, on critiquera plutôt ici la direction artistique choisie et non la technique elle-même.
Venons-en au corps de l’œuvre, à sa consistance : les compositions. Pour ne rien vous cacher, on s’éloigne ici significativement des qualités de l’album, et c’est bien là le problème. Ethan prend le parti de faire de sa musique une trame sonore aérée, apaisante et à de (trop) rares moments plus compacte, plus dense. D’un « From Snow To Sea » qui s’offre pourtant l’un des rares passages plus rythmés, à un « And See To Sky (Bon Voyage) » qui clôt le propos en rehaussant à nouveau légèrement le ton, on ne sent pour ainsi dire aucune progression dans l’œuvre pourtant progressive de M. Matthews.
Notre homme a pourtant essayé de s’appuyer sur un concept unique qu’il aurait pu faire exploser et s’apaiser tour à tour en conservant une unité thématique et sonore. La richesse que nous soulignons comme une qualité indéniable est bel et bien présente, mais comme nous l’évoquions également : elle est parfois bien trop présente. Les beats technoïdes s’enchaînent sur la quasi-totalité des titres, venant gâcher par exemple la belle intervention à la guitare sur « Trans-Atlantic », et leur conférant régulièrement un côté 80’s du pauvre. On note ainsi dans les ambiances l’influence évidente d’un Depeche Mode, sans jamais que le son ne parvienne à atteindre la densité de cette glorieuse référence.
Mais le gros point noir de ce disque restera sans aucun doute la voix, toujours plaintive, pour ne pas dire geignarde, et truffée d’écho (tiens écho, étonnant non !) ou de reverb mal venue. S’il reste très subjectif de faire un procès à la musique en elle-même, qui recèle toujours de bonnes idées plus ou moins bien exploitées, on ne pourra par contre que tomber d’accord sur la pénibilité de cette voix nasillarde qui achèvera de rebuter les plus récalcitrants, et découragera les plus conciliants.
Echo Us est donc l’album frustrant type : truffé de bonnes idées mais ne décollant jamais vraiment, ne parvenant pas à se détacher d’un esthétisme pesant, quand l’efficacité de quelques crescendos bien menés aurait suffi à transcender le tout. Echo Us est aussi le parfait exemple que n’est pas chanteur qui veut, et qu’il ne s’agit pas simplement de déclamer sa prose sur une trame sonore pour prétendre à ce titre. Ethan Matthews reste un excellent musicien dont on attend beaucoup plus...