Pourquoi faire compliqué lorsqu’on peut faire simple ? Peut-être pourrais-je poser la question sous une autre forme : qu’est-ce qu’un hit ? Attention, je ne parle pas de votre morceau favori dans la discographie d’un groupe de Deathcore Expérimental Progressif ! Non, non : je vous parle ici du titre immédiat, sans fioriture, en trois ou quatre accords, du morceau capable de vous faire sortir du lit avec le sourire un lundi matin pluvieux, headbanger sous la douche et beugler dans la cage d’escaliers !
Toujours aucune idée ? Vous repensez nostalgique à Bon Jovi ? Vous essuyez une larme au souvenir de Def Leppard ? Ne vous inquiétez plus : revoici nos jeunes Canadiens post-grungeurs de Three Days Grace, au style rebelle l’Oréal et à la coiffure grasse certifiée Jacques Dessange. Après un premier album tonitruant et franchement réussi, on se demandait si nos amis n’allaient pas exploser en vol comme leurs estimés collègues Creed ou Nickelback.
Soyons, à l’image de leur musique, concis et efficaces : en 12 titres, le groupe se paye de luxe de délivrer 12 hits, 12 bombes lâchées sur votre crâne d’amoureux de mélodies fortes et épurées qui n’en demandait pas tant ! Eviter les fioritures disions-nous : parfait, il n’y en a aucune ici. A peine quelques cœurs sur un « One-X » titanesque, quelques arrangements acoustiques sur la ballade « Never Too Late », rien d’autre à signaler.
Petit rappel de la recette Three Days Grace : prenez une voix puissante, éraillée et maîtrisée, plaquez des power-chords velues et carrées sur une rythmique nette et précise, plongez le tout dans la source inépuisable des paroles énervées et légèrement mélancoliques, vous voila avec un hit agréé MTV ! Le but de cette cuisine ? Ce n’est ni la découverte de saveur exotique, ni l’indigestion par trop plein d’absorption : rien de tout cela, simplement le plaisir coupable de se voir retendre la main encore et encore pour piocher dans le plat une nouvelle portion de rage mélodique.
Réduits à l’essentiel, épurés sans paraître pauvres pour autant, chaque titre s’offre avant toute chose des refrains et couplets gigantesques, amplifiés jusqu’à l’explosion mais pourtant étonnamment faciles à digérer. Une capacité a faire claquer chaque mot comme un hymne à lui seul qu’on retrouve par exemple dans « Time Of Dying », titre où il devient même difficile de distinguer couplet et refrain, tant la densité du chant y est forte. Entre autres exemples, car tous pourraient être cités, peut-être peut-on conseiller de jeter une oreille sur « On My Own », « Over And Over » ou « Pain », pour se rendre compte de la jouissance provoquée à chaque syllabe.
Côté instrumental, rien n’est laissé au hasard : chaque riff, chaque note a été posée là où elle est jouée pour déclencher un plaisir immédiat, instantané et sauvage. Tandis que les guitares ravagent tous sur leurs passages, suivant des schémas fédérateurs en diable, la simplicité semble à nouveau être le mot d’ordre imposé, sans qu’on ne glisse dans un simplisme qui aurait bien vite lassé. De la basse claquante d’un « Animal I Have Become », à l’acoustique d’un « Never Too Late », du crescendo d’un « Get Out Alive », aux explosions d’un « One X » : tout n’est que rage, précision et perfection.
Nombreux sont les groupes a s’être élancés dans un créneau saturé de chanteurs à la mèche rebelle pour jeunes filles en fleurs éplorées. Bien peu sont les rescapés de cette aventure tubesque, ou seule la capacité a enfiler les hits comme les colliers de perles permet de survivre. En deux albums, cette bande de Canadiens vient de faire la preuve d’un talent immense dans un domaine où ce qui est formaté est béni, mais bien vite oublié. Gageons qu’avec un troisième album réussi, ils entreront au Panthéon de ces groupes commerciaux restés gravés dans les mémoires, ce One X tambourinant déjà violemment à la porte !