Les dernières notes de ce nouvel opus des Crucified Barbara s’égrainent, et le constat tombe : nous sommes le sexe faible. Oui, nous : les hommes ! Prenons un exemple tout simple : vous n’arriverez jamais à vendre un album de Black Sabbath à votre meilleure amie si elle n’a pas au préalable une très profonde sympathie pour le Heavy Metal. En effet, il est peu probable que l’image d’un Ozzy Osbourne à moitié nu sur scène la motive outre mesure. Alors que je pourrais vendre à tout être masculin hétérosexuel la dernière galette de nos quatre Suédoises sans avoir même à presser le bouton Play. Ce n’est pas sexiste, encore moins machiste, tout juste cruel pour nous : le sexe faible !
Une fois le constat visuel posé, il serait tout de même intéressant de parler un peu musique, et de ce côté-là autant le dire tout de suite, nous restons soumis à la loi de nos hôtesses du jour. Alors qu’elles avaient déjà jeté un pavé dans la mare Hard-Rock en 2005, en proposant un "In Distortion We Trust" retentissant, particulièrement au sein de nos frontières francophones où il avait réalisé ses meilleures ventes, voici qu’explosent littéralement à nos oreilles les 11 titres et 40 minutes de ce "Til’ Death Do A Party".
Explosion, car si les 10 courtes secondes d’intro auraient pu nous faire croire que la virilité du genre n’était pas en danger, les guitares qui se mettent rapidement à rugir pour une série de riffs imparables et particulièrement velus font voler en éclat cette frêle certitude misogyne ! « Killer On His Knees » donne, en 4 minutes, une illustration de tout le talent d’une formation incroyable de conviction et de précision. Chaque riff est millimétré, les soli et voix assurées par la même Mia sont étonnants de maîtrise, et la section rythmique martèle sa marche en avant sans sourciller une seconde.
Bénéficiant d’un son résolument Heavy grâce à leur collaboration avec un certain Mats Levèn (vocaliste, entre autre, de Thérion), les compositions semblent également s'être légèrement étoffées par rapport au premier pavé évoqué précédemment. Alors que l’on aurait pu craindre une dilution de l’énergie sur la longueur, « Pain & Pleasure », « Sex Action », puis « Creatures » viennent nous prouver le contraire avec une densité jamais prise en défaut. Là encore, riffs, soli, voix et chœurs sont irréprochables, et Mia nous prouve avec un plaisir partagé, que les femmes ont une place à se faire en dehors des formations symphoniques ou atmosphériques ! Nous retiendrons d’ailleurs le hurlement en introduction de « Creatures » qui finira de convaincre les plus sceptiques.
Les titres s’enchaînent donc jusqu’à un « Jennyfer », ballade semi-acoustique voyant Mats Levèn sortir de sa cabine de production pour prêter sa voix aux quatre demoiselles. L’exercice surprend autant par la rupture qu’il provoque au sein du disque, que par ses qualités mélodiques indéniables qui font rapidement de lui un nouveau morceau accrocheur et mélodique en diable. Le retour à la normale qu’impose et « Dark Side » retentit comme une nouvelle déflagration, sur-vitaminée si nécessaire par un solo de Mr. Phil Campbell, six-cordiste de Motörhead. « Can’t Handle Love » et « Blackened Boys » poursuivent dans la même veine sans perdre en intensité.
Nos Barbara nous rejouent la carte de la rupture aux tonalités acoustiques avec un « Danger Danger » qui n’a pas plus à rougir que « Jennyfer ». L’épilogue de l’offrande se dessine alors avec les toujours ébouriffants « Rats » et « Feels Like Death ». Derniers claquements de basse et caisse claire, dernières cordes grasses et voix rageuses, et l’on reste comme soufflé par la tornade qui vient de déferler !
Rangez les tatouages et les crânes rasés, le sexe fort porte des pantalons en cuir moulants et revêt une chevelure blonde abondante ! Sans chichi, et en préservant une sensibilité toute féminine, Crucified Barbara vient de s’attaquer une seconde fois, avec toujours autant de réussite, aux préjugés les plus vieux du monde. En matière de rock et de lutte des sexes, on peut donc désormais détourner une célèbre expression et décréter : « Faites du Heavy, pas la guerre » !