Amis de la sobriété, de la finesse et du bon goût, vous pouvez passer votre chemin... Ou vous armer d'une boîte entière d'aspirine. La musique d'Iwrestledaberonce (ou IWABO pour I Westred A Bear Once) est aussi bordélique et peu digeste que le nom du groupe est imprononçable. C'est dire.
Remarqués grâce au titre "Tastes Like Kevin Bacon" (décidément, l'acteur, autrefois prétexte à un jeu, se retrouve maintenant utilisé pour une chanson !) qui a donné lieu à une vidéo, ce collectif bien frappé enfante aujourd'hui un premier galop d'essai aux allures d'happening musical et ce, sous les meilleurs auspices possibles : un deal avec le puissant Century Media et une production concoctée par Ryan Boesch (Norman Jean, Tomahawk...) dans l'antre du mythique Ross Robinson (Slipknot).
De bonnes cartes en main donc pour un album qui ne laissera personne indifférent. Il faut au moins lui reconnaître cela. Puissant et ravageur, "It's All Happening" a quelque chose d'une auberge espagnole où se côtoient aussi bien de l'electro ("Taste Like Kevin Bacon"), du grindcore, du jazz (?), du gothic metal pur jus à la Evanescence, du metalcore, de la country même ("You Ain't No Family").
Pour pimenter un peu tout ça, ajoutez des grognements de bêtes en rut, des fractures rythmiques à tous les étages et vous comprendrez que le plat proposé ici risque de vous rester un peu sur l'estomac. Et bien que les titres soient très courts (guère plus de trois minutes en moyenne), on a l'impression à l'écoute de ce disque que sa durée en fait au moins le double !
Heureusement qu'il y a le chant clair de Krysta Cameron, seul oasis de fraîcheur dans cet empilement de couches sonores et d'influences parfois des plus improbables, pour tendre de cet ensemble disparate une main salvatrice. Au sein de ce tourbillon frénétique, la présence de la jeune femme fait en effet un peu office de balise ("White Water In The Morning", "I'm Cold And There Are Wolves After Me") à laquelle on a besoin de se raccrocher si l'on ne veut pas rester sur le bord de la route. Difficile d'imaginer qu'il s'agit de la même jeune femme qui éructe comme un goret le reste du temps !
Refusant d'être inféodé à de quelconques étiquettes, ce qui est tout à son honneur, Iwrestledaberonce donne toutefois l'impression de vouloir trouver une raison d'être, en même temps qu'une forme de singularité, par l'addition des genres, mélange sans lequel le groupe paraîtrait finalement dénué d'intérêt réel. Mais n'est pas un Faith No More - ou un Dillinger Escape Plan dont ces Américains pourraient en quelque sorte être les enfants bâtards - qui veut. L'art, délicat, du patchwork réclame une vision, un sens de la fluidité qui fait encore (pour l'instant) défaut à cette équipe malgré tout intéressante et non dénuée d'idées. Ainsi, certains titres, à l'image de "The Cat S Pajamas" ou bien "Blackeyed Bush" témoignent de qualité d'écriture certaine.
De bonnes choses en définitive mais Iwrestledaberonce gagnerait à canaliser davantage le geyser créatif qui lui sert de matrice. Mais sans cet éparpillement, sa musique aurait-elle encore un sens ?